L’ADEME tombe dans le panneau de l’agrivoltaïsme.

Communiqué n.10

1- L’ADEME tombe dans le panneau de l’agrivoltaïsme.

2- Un Arrêté et un Décret sur « l’agrivoltaïsme » mettent en danger le monde agricole, consultation en cours jusqu’au 25 mai.

Par le collectif de réflexion citoyenne sur le photovoltaïque du Causse Comtal, le 17 mai 2022

touroulisducaussecomtal@gmail.com

site CCAVES.ORG

Première partie

En 2019 l’ADEME écrivait que « les modèles en toiture doivent être privilégiés, pour éviter d’occuper des sols agricoles et de nuire à l’image de cette énergie renouvelable (…) L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) a identifié près de 18.000 sites « propices à l’installation d’une centrale photovoltaïque » qui pourraient générer plus de 50 gigawatts, soit bien plus que l’objectif fixé par l’État »1.

Mais dans son rapport de 2022 concernant le photovoltaïque sur des terres agricoles et « l’agrivoltaïsme » l’ADEME a pris un bon coup de soleil et se met à divaguer : « ces recommandations visent à encourager et favoriser le déploiement des projets agrivoltaïques»2 .

Nous verrons ainsi que l’ADEME légitime presque tous les projets sur des terres agricoles et naturelles, même s’ils ne correspondent pas à cette nouvelle définition de l’« agrivoltaïsme ». Cette supercherie lui fait écrire que «les systèmes photovoltaïques sur des terres agricoles sont une solution potentielle ».

Nous récusons la notion d’agrivoltaïsme et tout projet photovoltaïque sur des terres agricoles et naturelles.

Nous donnons 15 critiques principales à ce rapport.

Les besoins réels d’observer la lumière : l’ADEME s’aveugle.

  1. L’ADEME à la recherche des « besoins réels »…

    « L’Ademe pose comme condition première, apte à justifier l’installation d’un système photovoltaïque sur un terrain agricole, l’existence d’un besoin réel de la part de l’exploitation. Quel service (direct ou indirect) rend le projet à l’exploitant, de quelle nature est-il et répond-il bien à un besoin ? »3 La notion de « besoin réel » est dangereuse. Est-ce celui de pallier aux difficultés du monde agricole par des revenus de location des terres auprès d’industriels de l’énergie (entre 2500 et 5000 euros par an et par hectares) ? L’Ademe va aussi en ce sens, nous le verrons.

  2. Un observatoire… pour observer les dégâts

    « L’Ademe propose ainsi une liste de recommandations dédiée aux porteurs de projet pour les aider à mieux concevoir leurs projets, mais aussi aux pouvoirs publics pour mieux accompagner ce secteur. En tête de ces mesures, la création d’un observatoire afin de centraliser les retours d’expériences, définir des indicateurs partagés de suivi agricole mais aussi, animer et structurer l’ensemble des parties prenantes de cette filière, complexe mais passionnante »4. Observer durant des années des projets expérimentaux et destructeurs pour le monde agricole…?

  1. Réduction de la lumière : l’ADEME tombe dans la mare agrivoltée.

    L’arboriculteur Jean-Luc Tarantini a suivi le projet de Bellegarde porté par AKUO et la MAIF, et il explique, au passage sans y prendre garde lui même : « En revanche, elle accumule dans ses réserves énormément d’azote. Nous pensons que le manque de luminosité lui fait craindre de ne pas exister. Elle fait du bois au lieu de faire des fruits »5Tiens donc !

    Dans son rapport l’ADEME explique « la réduction de la lumière liée à la présence de modules PV constituent la principale contrainte écophysiologique sur la productivité des plantes (…) la littérature sur les impacts des modules sur la distribution de l’eau et l’érosion est relativement limitée (…) les modules génèrent de forts contrastes de répartition de l’eau dans le sol avec la formation d’un bulbe d’eau dans le sol à l’aplomb du panneau (…) les références bibliographiques sont incomplètes et difficilement comparables (il y a) un manque de retours expérimentaux sur des séries pluriannuelles». Malgré cela, l’ADEME en arrive à conclure que si le manque de lumière est un facteur limitant la croissance des plantes, « selon les cas, l’amélioration de l’efficience de l’eau peut contrebalancer les effets d’ombrages ». « Selon les cas »… on suppose que l’ADEME, via son observatoire, viendra démanteler un projet dans lequel cette efficience productive pataugerait dans l’ombrage des panneaux. L‘ADEME avance au « doigt mouillé »…

Les 3 critères pour qualifier un exploitant agricole « d’agrivolté »

  1. Premier critère « agrivolté » : « les services agronomiques directs » de l’ADEME servent la soupe aux industriels de l’énergie.

    L’ADEME évoque le premier critère pour qu’un projet soit qualifié d’agrivoltaïque. Il s’agit d’« installations en complète synergie avec l’activité agricole, apportant un service agronomique direct (…) C’est par exemple le cas quand des ombrières photovoltaïques améliorent la production agricole, en la protégeant des aléas climatiques, et apportent directement un revenu complémentaire à l’exploitant »6. Notons que « service agronomique direct », « complète synergie » sont des notions si vagues que bien des actions des industriels peuvent y entrer. Prenons un exemple d’apparence absurde, de « service agronomique direct » : des courges poussant à l’ombre des panneaux, et des pois mange tout grimpant sur les pieux (en bois : merci Céléwatt !). Ces cultures apportent « un revenu complémentaire » grâce au « service agronomique direct » de la présence des panneaux… Quand les critères de l’ADEME deviennent abscons…

    Qui plus est, afin de protéger des aléas climatiques les élevages et améliorer les productions, l’Ademe semble oublier que l’agroforesterie fait très bien cela.

  2. L’ADEME coupe à blanc l’agroforesterie

    L’ADEME : « Des études soulignent les bénéfices que peut apporter, parfois, la présence de modules photovoltaïques sur une parcelle cultivée, en la protégeant contre les aléas climatiques et en améliorant les conditions de culture, notamment dans les régions sèches – en apportant de l’ombre ou en limitant l’évapotranspiration et donc les besoins en irrigation »7. Dans son rapport l’ADEME explique quant à la diminution de l’évapotranspiration, soit-disant avantage de « l’agrivoltaïsme » « que cette amélioration n’est pas systématique (…) les panneaux PV ont un rôle potentiel à jouer » dans un contexte de changement climatique.

    Rappelons une fois encore que pour limiter l’évapotranspiration, favoriser le bien être animal, augmenter la qualité et la quantité de sa production, une des solution ayant fait ses preuves se nomme l’agroforesterie : « Des études de l’INRA ont montré que l’on produisait plus en associant arbres et cultures qu’en séparant les deux. (…) les arbres (…) protègent cultures et animaux des excès climatiques (chaud, froid, tempête, inondation, sécheresse)(…) L’arbre (…) rafraîchit l’atmosphère en été, tandis que sa présence limite l’effet du vent, responsable d’importantes pertes d’eau par évaporation »8.

  3. Deuxième critère « agrivolté » : « une dégradation acceptable » de la production agricole au nom de la « performance qualitative ».

    « Le deuxième critère concerne l’incidence du système sur la production agricole : est-ce qu’il la dégrade, la maintient (ou la dégrade légèrement), ou l’améliore ? Cette évaluation porte sur le rendement et sur la performance qualitative : une production équivalente en volume ou qui baisse légèrement peut gagner en qualité »9. La baisse de quantité est justifiée par un critère flou d’augmentation de la « qualité ».

    Ainsi l’installation photovoltaïque ne doit pas « induire une dégradation importante de la production agricole»10. Dans son rapport elle explique encore que les panneaux peuvent avoir une incidence sur la production agricole et améliorer, maintenir ou « dégrader de façon acceptable » la production. Nous considérons que la notion de « dégradation importante » est trop vague et permettra par exemple à des porteurs de projets de justifier une dégradation moindre que celle prévue de prime abord dans les premières études d’impacts. Quant à « la dégradation acceptable », elle n’est pas acceptable…

    Dans son résumé technique l’ADEME reconnaît que « la mise en place de panneaux a en général, des effets neutres ou négatifs sur la production agricoles »11. Notons qu’elle ne mentionne pas des effets positifs comme étant généralement observés… mais négatifs et parfois neutres sur la production.

    Mais qu’en est-il des effets sur la biodiversité ? sur l’indépendance des paysan.nes ? Sur les paysages ? Il n’ y a nulle neutralité à légitimer la fuite en avant d’un modèle agricole productiviste et les difficultés des paysan.n.e.s qu’il engendre. Qui plus est nous verrons que l’ADEME nuance par la suite ce critère de dégradation de la production s’il y a « un couplage d’intérêt pour l’agriculture ».

  4. Troisième critère « agrivolté » : l’amélioration du revenus agricole de l’exploitation dans son ensemble

    3ème critère : seule une augmentation des revenus, sans perte des revenus agricoles, est considéré comme « agrivoltaïque ». Doit-on accepter que les paysann.es deviennent des « énergiculteurs » et tirent des revenus d’installations industrielles ? Aussi L’ADEME viendra-t-elle contrôler les comptes des paysan.n.e.s pour vérifier ses dires ? Sur la « diminution de revenus », nous nous questionnons : si une dégradation de la production advient, comment une perte de revenus ne pourrait-t-elle pas suivre ? Excepté si l’ADEME envisage de faire croire que les panneaux permettent d’augmenter la qualité ou de convertir l’agriculteur vers des labels plus rémunérateurs. Nous répondons qu’il n’ y a point besoin de panneaux pour cela. Aussi, elle ouvre tout de même la porte aux projets photovoltaïques sur des terres agricoles qui ne répondraient pas à ce critère…

Des projets sur des terres agricoles non « agrivoltaïques » mais « acceptables »…

  1. Quand la rente financière de la location des terres à des industriels devient une vertu écologique.

    S’ils ne peuvent s’appeler « agrivoltaïques » l’ADEME légitime les autres projets sur des terres agricoles « qui peuvent présenter un intérêt pour l’agriculture ». Cette expression relève plus de la voyance que de l’agronomie. L’ADEME accepte des projets qui certes baisseraient les revenus agricoles, mais augmenteraient les revenus globaux par les locations de terres. Ainsi «l’Ademe préconise de mesurer l’effet du système sur les revenus de l’exploitation, avant et après l’installation : améliore-t-il ou non sa situation financière ? En considérant l’évolution des revenus agricoles de l’exploitation ainsi que les revenus supplémentaires apportés par le photovoltaïque »12.

    Là, on touche au cynisme le plus pur, et l’on comprend mieux la notion de « besoin réel » donnée par l’ADEME, pouvant au final s’avérer être financier. Dans un contexte de lourd endettement des agriculteurs à cause du modèle productiviste- entretenu entre autre par les industriels de l’agrochimie, de la grande distribution- l’ADEME justifie que ces mêmes industriels (pensons à Voltalia qui appartient à la famille Mulliez détenant une partie importante de la grande distribution) jouent aux pompiers pyromanes en remplaçant cette dépendance des agriculteurs par une autre, mieux perçue car porteuse de l’énergie verte. Comme l’exprime très clairement un agriculteur portant le projet Montcuq en Quercy « avec ce projet, je perdrai l’argent de la PAC mais je récupérerai un loyer à la place, plus intéressant.»13 Qui plus est Julien Thiery, chef du service viticulture à la chambre d’agriculture des Pyrénées-Orientales ajoute : « Quand la production électrique rapporte beaucoup plus que l’agriculture, c’est un peu le pot de terre contre le pot de fer»14.

    D’ailleurs dans son rapport l’ADEME met en avant que « selon les exploitants agricoles interrogés, les principaux atouts de ces projets sont l’accès à des structures agricoles à coûts nuls (…) l’accès à du foncier supplémentaire (…) le soutien économique à la valorisation d’un foncier (…) la pérennisation d’une exploitation ». Nulle trace d’écologie dans les principales raisons des paysan.n.e.s, seules existent des difficultés financières sur lesquelles prospèrent les industriels et que vient légitimer l’ADEME.

  2. « Le couplage d’intérêt pour l’agriculture » vise à justifier une perte de revenus agricoles : une rhétorique fallacieuse de la part de l’ADEME

    Dans un article sur le site de l’ADEME, la prestidigitatrice et coordinatrice photovoltaïque de l’ADEME Claire Melh, explique que cette « diminution de revenus » peut se justifier et se compenser via ce qui s’avère être au final un tour de passe passe. Ainsi « d’autres types d’installations intermédiaires dites de « couplage d’intérêt pour l’agriculture » visent plutôt un équilibre entre les deux activités, acceptable pour l’agriculteur. Parmi la cinquantaine de réalisations que nous avons documentées, prenons l’exemple d’un maraîcher qui s’est équipé il y a quelques années d’une serre photovoltaïque. Ce projet lui a donné accès à du matériel technique supplémentaire – la serre – lui rendant un service que nous appelons indirect, car ce ne sont pas les panneaux photovoltaïques qui le lui apportent directement. Les rendements et la qualité des productions y sont légèrement inférieurs à ceux d’une serre voisine, classique. Cependant, le développement de la vente en circuit court, favorisé par la serre, a permis de maintenir les revenus de l’exploitation.15

    Relevons que « couplage d’intérêt pour l’agriculture », « équilibre entre les deux activités » ne sont en rien des critères objectifs. Nous constatons que l’Ademe entend l’idée de « sans diminution des revenus agricoles » (voir point 5) d’une façon très souple, puisqu’elle prend l’exemple d’une baisse de revenus due à une ombrière photovoltaïque mais que viendrait compenser « la vente en circuit court » soit-disant favorisée par « le service indirect » qu’est la serre photovoltaïque.

    Résumons : « grâce » aux panneaux, l’agriculteur installe une serre, et certes ses revenus, la qualité et la quantité baissent, mais grâce à la serre qui (magiquement) favorise la vente en circuit court, ses revenus augmentent… ce qui transforme le tout en un « couplage d’intérêt pour l’agriculture » et en « un équilibre entre les deux activités ». Il s’agit d’une magnifique rhétorique d’équilibriste de la part de l’ADEME. Tout d’abord l’agriculteur avait-il besoin d’industriel de l’énergie pour monter une serre et se lancer dans la vente en circuit-court ? Ne serait-ce pas à la puissance publique d’organiser et d’aider en ce sens ? Poussons le raisonnement de l’ADEME : si l’agriculteur fait, par exemple, pousser des pois mange-tout le long des piquets supportant les panneaux, ne pourrait-on pas dire que ces légumes en viennent à être cultivés « grâce aux panneaux », et qu’un « couplage d’intérêts » voire même « un service direct » sont ainsi rendus par les panneaux à l’agriculteur qui constate la pousse de ces haricots ? Ne dirait-on pas du Pangloss dans le récit de Voltaire ?

    Claire Mehl, coordinatrice photovoltaïque ADEME définit dans un article de « connaissance des énergies »16 cette notion de « de couplages d’intérêt potentiel pour l’agriculture » : « ces systèmes, sans être agrivoltaïques, démontrent des bénéfices et des opportunités réelles pour certaines exploitations agricoles grâce à l’apport d’un équilibre entre productions agricole et énergétique ». L’ADEME ouvre ici la voie à du PV sur sol agricole qui ne répondrait pas aux critères déjà flous et dangereux de l’agrivoltaïque.

Quand l’ADEME est pleine d’attention… vers les producteurs d’énergie

L’ADEME ajoute à ces trois premiers critères, 7 critères d’ attention.

  1. Première, seconde et troisième « attention » : « adaptable, flexible, réversible », l’ADEME se contorsionne…

    Le rapport explique que « le projet agrivoltaïque se doit d’être adaptable et flexible pour répondre aux évolutions dans le temps (…) est-il réversible dans le temps ? ». Faisons du streching temporel : si un.e paysan.n.e décide de passer de l’élevage ovins à la culture de fruitiers (imaginons des pommiers francs libres), les industriels agrivoltés viendront-ils démonter leur attirail sur des dizaine d’hectares ?

  2. Quatrième « attention » cette fois-ci vers les agriculteurs : l’ADEME leur vend des portefeuilles… financiers

    « Le 1er de ces critères d’attention porte sur la vocation et la pérennité du projet agricole : l’exploitant a-t-il été associé à la conception du projet et bénéficie-t-il d’un accompagnement technique ? Participe-t-il au capital de la société de projet ? »17 Hum… donc si les agriculteurs ont été « associés » au projet (il est difficile de penser qu’ils le découvrent construit un beau matin sur leurs terres…) pour l’ADEME « ça passe » ! Et puis c’est encore mieux pour l’Agence de l’Environnement et de Maîtrise de l’ Énergie, si en plus les agriculteurs deviennent de petits financiers et détiennent des actions dans ces sociétés dépendant de multinationales.

  1. Cinquième « attention », l’ADEME est en adéquation avec le territoire… de la finance verte

    Cela se nomme « l’ adéquation territoriale ». Ainsi « La 2e série de critères complète l’analyse en évaluant la pertinence du système dans son contexte local : si des ombrières destinées au maraîchage sont installées dans une zone où il n’y a des débouchés que pour des céréales, cela paraît absurde. Ces éléments varient en fonction de chaque contexte »18 Alors là… on reste pantois. Ce qui « paraît absurde » c’est que l’ADEME tente d’avoir un avis sur les débouchés des productions, et légitime les contextes locaux de monocultures tout en conseillant aux agriculteurs de s’équiper en photovoltaïque sur leurs terres en fonction des débouchés agricoles contrôlés par l’industrie de l’agroalimentaire. Comme l’explique la Confédération Paysanne de l’Aveyron, les agriculteurs deviendront dépendants des choix agronomiques définis par la présence des panneaux : « Les panneaux réorientent les choix de production vers ce qui est compatible avec les panneaux, plutôt que vers ce qui est souhaitable agronomiquement »19. Pour preuve avec un exemple en Aveyron sur le Causse Comtal, nous pouvons lire p.10 de la brochure de présentation du projet Voltalia20 que « les panneaux solaires se situeront entre 1 m60 à 1 m80 en bas de panneau et 3m30 à 3m50 en haut de panneau (…) Un espacement de 5 mètres entre les rangées de panneaux est prévu pour permettre le passage des tracteurs. » 5 mètres… ce qui est peu et contraint fortement tout travail agricole. Qui plus est, si la famille Lapeyre portant ce projet décide un jour de changer de production, Voltalia s’engage-t-elle à venir démonter ses panneaux et ou les placer ailleurs et différemment sur leur ferme ? L’on voit ainsi que c’est l’agricole qui in fine doit s’adapter à la production d’énergie et en devient dépendante.

    L’ADEME dit pourtant prendre en compte « la capacité d’adaptation de la structure photovoltaïque aux évolutions de cultures agricoles et d’itinéraires techniques »21 : l’on ne voit pas comment cela deviendra possible une fois des dizaines d’hectares de panneaux en place.

    D’ailleurs dans son rapport l’ADEME avoue que « les retours d’expériences collectés ont mis en lumière des des modifications potentiellement profondes des itinéraires techniques et des productions des exploitations ». Elle n’est plus à une incohérence près !

  2. Une consultation et tout est oublié…

    Autre critère d’adéquation territoriale… « Au-delà de ces aspects, s’intègre-t-il dans une dynamique territoriale ? (…) Les acteurs locaux ont-ils été consultés ? »22. Qu’est-ce qu’une « consultation» ? Celle d’élu.es locaux qui n’ informent les citoyen.nes que lors de l’enquête publique ? Qui refusent tout référendum ? « Une dynamique territoriale », est-ce celle d’ agriculteurs s’enrichissant afin de purger leurs dettes imposées ; est-ce la dynamique de Communautés des Communes recevant des centaines de milliers d’euros annuels des industriels ?

  3. Sixième « attention » au foncier agricole : quand l’ADEME se pose les bonnes questions et feint de méconnaître les réponses.

    « Quel impact du projet sur le prix du foncier agricole et la transmission de l’exploitation ? Des agriculteurs en fin de carrière peuvent choisir un tel système pour s’assurer une rente, quitte à affecter le prix du foncier et les projets du nouvel exploitant en cas de transmission. » A cette question dont l’ADEME feint d’ignorer la réponse, nous pouvons rétorquer que « l’intérêt de l’agrivoltaïsme résiderait surtout dans la possibilité d’utiliser de nouveaux espaces, engendrant par ricochet une forte inflation des prix des terres. Car là où un fermage agricole se négocie entre 100 et 150 €/ha, les terres louées dans le cadre d’un projet agrivoltaïque se négocient dix fois plus, parfois au-delà de 2 500 €/ha »23. Aussi «Entre le prix d’une parcelle agricole ou d’une autre qui fournit de l’énergie, on passe d’une échelle d un à dix » confirme Xavier Bodard, gérant d’Éco Solutions Énergie»24 La présence de panneaux va engendrer des tensions entre agriculteurs et des difficultés de transmission et d’installation de nouveaux paysans.

  1. Septième « attention » aux impacts environnementaux et paysagers

    « D’autres aspects sont à considérer : l’impact sur les sols, les impacts environnementaux et paysagers ». Les impacts paysagers… l’ADEME pense-t-elle sérieusement qu’un seul parc de panneaux ne vient pas défigurer des zones agricoles et naturelles ? Ainsi l’ADEME sous entend-t-elle qu’il y aurait des impacts paysagers acceptables sur de telles zones ? Sur les impacts environnementaux, nous avons des réponses concrètes pour bien des projets en Aveyron25 .

    Récemment La MRAE (autorité environnementale de l’Occitanie) s’est de nouveau exprimée au sujet des projets du Causse Comtal que « de nombreux projets, souvent avec des ampleurs très importantes, prennent place sur des secteurs à enjeux environnementaux, comme ici dans un réservoir de biodiversité. Ces projets relèvent plus d’une recherche d’opportunité foncière que d’une démarche d’évaluation environnementale dont la première étape consiste en la recherche d’un site de moindre enjeu environnemental »26.

    Plus généralement « Le recul est encore très faible concernant les impacts à long terme pour la biodiversité de ces installations. Les premières études notent une « modification des cortèges d’espèces » pour les habitats fortement transformés (Visser, 2016)27

    Aussi Enerplan et le Syndicat des énergies renouvelables ont tenté de montrer les bienfaits de 111 parcs photovoltaïques mais Reporterre nous apprend que « le document s’est fait étriller par le Conseil supérieur de protection de la nature d’Occitanie. Dans son autosaisine de juin 2021, le président de l’instance, Laurent Chabrol, note que « les analyses reposent sur un faible nombre de données avec l’utilisation de référentiels inappropriés ». Il souligne également un mélange « de données de sites initialement dégradés avec des sites initialement naturels ». Par conséquent, « la conclusion affirmée d’effets neutre à positif des parcs photovoltaïques au sol sur la biodiversité n’est pas démontrée »28. Ce rapport indique aussi : « (…) Il aurait été correct de rappeler à l’occasion d’une étude de cette portée nationale que l’énergie la moins polluante est celle qu’on ne consomme pas ou du moins, pour celle issue du photovoltaïque, qui consomme le moins possible de milieux naturels et agricoles en privilégiant les toitures, parkings, zones déjà très artificialisées. (…) On conclura que, dans cette étude, l’absence de comparaison avec des témoins ne permet pas de conclure. D’autres paramètres permettant de suivre l’état de conservation des communautés sont à prendre en considération en termes d’impact, auxquels il serait intéressant d’ajouter une évaluation de la fragmentation des espaces due aux installations elles-mêmes. (…) Une prise en compte de ces biais ne devrait pas permettre la publication de ce document dans un contexte objectif des effets des installations photovoltaïques dans les trois régions ciblées. Leur reprise dans une synthèse diffusée à l’échelle nationale peut être à l’origine d’un effet d’annonce indésirable et contraire à la protection des espaces naturel et leur biodiversité. (…) Page 6 de la synthèse est indiqué « Pour les papillons de jour, des tendances d’évolution positives de la richesse spécifique (non majoritaires mais également bien présentes pour la patrimonialité et la valence écologique). » En regardant les résultats amenant à cette conclusion, il apparaît que ceux-ci ne sont pas issus de la tendance globale mais de la seule existence de cas positifs. En continuité des remarques précédentes, afin de remédier à ce type de dérive d’interprétation, il conviendra d’effectuer une analyse distinguant dès le départ les cas d’étude avec des états initiaux homogènes »29

 

L’agrivoltaïsme s’oppose à l’agriculture paysanne.

La Confédération Paysanne de l’Aveyron souligne justement que : « Les panneaux diminuent la surface agricole utile, gênent le travail (Les arbres ont été arrachés pour laisser la place au tracteur et maintenant on installerait des panneaux parce qu’ils rapportent gros ?), et réorientent les choix de production vers ce qui est compatible avec les panneaux, plutôt que vers ce qui est souhaitable agronomiquement (…) l’agriculture est l’une des professions qui rémunère le moins en France, un malaise de la profession est reconnu, une motivation essentielle est la qualité de vie au travail, le travail en plein air, un cadre de travail beau, regarder le ciel et écouter le chant des oiseaux… Il n’est pas souhaitable de dégrader cette qualité de vie au travail alors que c’est un secteur qui doit recruter massivement dans les prochaines années avec le départ des baby boomer à la retraite. Travailler sous des panneaux c’est dégrader notre qualité de vie au travail, c’est aussi dégrader l’environnement et les paysages de tous pour le bénéfice de quelques-uns (quelques propriétaires et promoteurs)30.

Ces projets « agrivoltaïques » s’opposent ainsi à « l’Agriculture Paysanne (qui) doit permettre à un maximum de paysans répartis sur tout le territoire de vivre décemment de leur métier en produisant sur des exploitations à taille humaine une alimentation saine et de qualité, sans remettre en cause les ressources naturelles de demain. Elle doit participer avec les citoyens à rendre le milieu rural vivant dans un cadre de vie apprécié par tous (…) Que cela soit par la préservation du cadre de vie, par l’entretien du paysage et la gestion du territoire, les ruraux dans leur vie quotidienne désirent la protection de cet espace générateur d’emplois. Un besoin concernant la qualité et la diversité du milieu naturel. La population est aujourd’hui favorable à la prise en considération impérative des exigences écologiques »31

« L’agriculture paysanne est un modèle de production agricole (…) axée vers la recherche d’autonomie dans le fonctionnement de l’exploitation »32. Mais l’agrivoltaïsme éloigne de l’autonomie et vise malheureusement à remplacer une dépendance financière aux marchés agricoles et aux divers fournisseurs par une autre plus moderne et consensuelle car porteuse de l’image de l’énergie renouvelable. Les agriculteurs se voient rémunérés des milliers d’euros par année et par hectare. Ils deviennent ainsi des producteurs d’énergies. Comme l’exprime un agriculteur portant le projet Montcuq en Quercy « avec ce projet, je perdrai l’argent de la PAC mais je récupérerai un loyer à la place, plus intéressant. » 33 Nous considérons au contraire que c’est à la puissance publique de leur permette de vivre dignement de leur métier agricole par des salaires et rémunérations décentes, et non à des acteurs privés. C’est d’autonomie démocratique dont ont besoin les paysan.n.e.s.

    1. Seconde partie

    1. Projets de décret et d’arrêté

    2. sur le photovoltaïque au sol

    3. en consultation jusqu’au 25 mai :

    4. Le monde paysan en danger

 

Commençons par présenter la contribution de la LPO. Selon elle aucun des trois critères que sont « 1. le maintien, au droit de l’installation, d’un couvert végétal adapté à la nature du sol ; 2. la réversibilité de l’installation ; 3. le maintien, sur les espaces à vocation agricole, d’une activité agricole ou pastorale significative, sur le terrain sur lequel elles sont implantées (…) ne peut garantir qu’une installation photovoltaïque n’affectera pas durablement les fonctions écologiques du sol, en particulier ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques ainsi que son potentiel agronomique ».

Quant à la Confédération Paysanne nationale, dans sa contribution à la consultation publique de ce Décret, elle explique : « Par ailleurs, le développement du solaire photovoltaïque sur des terres agricoles sous toutes ses formes affectera durablement l’occupation et l’usage des sols agricoles. Il aboutit de fait à une artificialisation des sols, car si la pose de panneaux photovoltaïques est matériellement réversible, elle ne l’est pas en pratique pour une question de rentabilité des investissements réalisés. De plus, il détourne le foncier agricole de sa vocation nourricière : la spéculation sur les terres « à énergiser » entraine une augmentation des prix du foncier, déjà perceptible dans certaines régions méridionales, qui constitue un obstacle à l’installation et au renouvellement des générations.C’est pourquoi nous considérons que le développement du photovoltaïque sur des terres agricoles constitue une menace pour le foncier, en terme d’artificialisation, de prix et de disponibilité pour la production alimentaire ».34

Des projets en l’absence d’activité agricole : le gouvernement copie l’ADEME… en pire.

L’article 1 permet dangereusement que des parcs puissent se créer en l’absence d’activité agricole (que nous jugions déjà incompatible avec le photovoltaïque).

Il est ainsi écrit « ou, en l’absence d’activité agricole ou pastorale effective, qui auraient vocation à s’y développer ». La garantie donnée ici repose sur une hypothétique activité agricole ou pastorale qui un jour, éventuellement, pourrait s’y développer par vocation. Cette phrase manifeste d’une volonté de déréglementation sans précédent au profit des industriels de l’énergie.

Relevons le cynisme des rédacteurs de cet article. Le décret et l’arrêté sont théoriquement là pour règlementer le photovoltaïque sur des terres agricoles avec comme condition floue « une compatibilité avec une activité agricole significative », condition que nous dénonçons jugeant tout projet sur des terres agricoles comme incompatibles avec l’agriculture. Mais, au détour d’une phrase, cette condition-qui n’en était pas une- disparaît…

Le gouvernement met le couvert végétal sur la table du greenwashing.

L’Article 1 du Décret met en avant le « le maintien, au droit de l’installation, d’un couvert végétal adapté à la nature du sol et, le cas échéant, des habitats naturels préexistants sur le site d’implantation, sur toute la durée de l’exploitation ».

La notion de « couvert végétal adapté à la nature du sol » est imprécise car à cette « nature du sol » est déjà associé des cultures inadaptées sans qu’aucune instance ne les remettent en cause. Les projets dits « agrivoltaïques » proposent par exemple du pâturage ovins après concassage de sols caussenards (Arkolia-Solarzac), ou du pâturage bovins sur des sols dédiés depuis des millénaires au pastoralisme ovins (Voltalia sur le Causse Comtal) ou encore des cultures fourragères sur du causse karstique (AKUO-Causse Comtal). En somme les porteurs de projets pourront justifier tout type d’installation tel qu’ils le font déjà.

Quant « aux habitats naturels préexistants », là aussi cela est imprécis. Par exemple un porteur de projet se targue de vouloir laisser « 40 cm de broussailles » sur le causse de temps à autre sous les panneaux : peux-t-on considérer cela comme le maintien d’un habitat naturel ?

L’espacement entre le gouvernement et les industriels est au moins égal à la largeur maximale d’un brin d’herbe en valeur absolue.

L’Article 1er de l’Arrêté définissant les caractéristiques techniques d’implantation des panneaux explique que l’ « Espacement entre deux rangées de panneaux distincts au-moins égal à la largeur maximale de ces panneaux, en valeur absolue ».

Il arrive souvent que les porteurs de projets espacent de 5 mètres les panneaux, ce qui correspond peu ou prou à la largeur de ces panneaux et donc à l’Arrêté en consultation. Mais 5 mètres entre deux rangées de panneaux est largement insuffisant pour manier des engins. Cela contraint fortement tout travail agricole. L’on voit ainsi que c’est l’agricole qui in fine doit s’adapter à la production d’énergie et en devient dépendante.

Nous appelons donc toutes les associations environnementales

et organisations paysannes

à lutter contre la notion « d’agrivoltaïsme »

et contre les projets s’en réclamant, qui ne font qu’aggraver les difficultés du monde agricole.

Afin que le collectif puisse continuer d’exister, de mobiliser contre ce projet, merci de nous aider en contribuant en ligne :

https://www.leetchi.com/c/collectif-de-reflexion-citoyenne-sur-le-photovoltaique-du-causse-comtal

Ou par espèces au Ptit bio, 5 allées des rosiers 12 330 Marcillac.

1 https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/larmee-donne-un-gros-coup-de-pouce-au-solaire-1123101
2https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/pv_sur_terrains_agricoles_-_resume_executif-1.pdf
3https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
4https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
5https://entreprise.maif.fr/actualites/2019/agricultute-bio-maif-transition
6https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
7 https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
8 https://www.agroforesterie.fr/agroforesterie-contributions.php
9 https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
10 https://reporterre.net/Le-solaire-sauveur-ou-fossoyeur-de-l-agriculture
11 https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/pv_sur_terrains_agricoles_-_resume_executif-1.pdf
12https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
13 https://reporterre.net/Dans-le-lot-un-projet-agrivoltaique-divise-Montcuq-en-Quercy-Blanc
14 https://www.liberation.fr/environnement/agriculture/agrivoltaisme-attention-a-ne-pas-tomber-dans-le-panneau-20211205_JIOKSQ5UWNENFL6Q7U5INCJSCI/
16 https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
17https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
18https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
19https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/ConfederationPaysanne12_Positionnement_Centrales_photovoltaiques_2021.pdf
20https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/LEnfumade-Voltalia-Mulliez-.pdf
21https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
22https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/agrivoltaisme-une-filiere-qui-doit-tenir-ses-promesses#comment-20707
23 https://www.contexte.com/article/energie/lagrivoltaisme-sort-de-terre-et-cherche-la-lumiere_129217.html
24 https://reporterre.net/En-quete-d-espace-la-filiere-photovoltaique-lorgne-les-terres-agricoles#:~:text=%C2%AB%20Entre%20le%20prix%20d’une,d’installations%20de%20nouveaux%20entrants.
25 https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/communique-novembre-2021-mrae-inflige-un-camouflet-au-projet-dAKUO-2.pdf
26 http://www.mrae.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/mrae_occitanie_bilan_activite_2021.pdf
27 https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0960148118310565
28 https://reporterre.net/Le-solaire-sauveur-ou-fossoyeur-de-l-agriculture
29 https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/2021-CSRPN-Occitanie-Avis_Etude_PV_Biodiversite.pdf
30 https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/ConfederationPaysanne12_Positionnement_Centrales_photovoltaiques_2021.pdf
31 https://pdl.confederationpaysanne.fr/gen_article.php?id=8909&t=Qui%20sommes-nous%20?&PHPSESSID=l1em48gojfjkkgkuaj2tcgtit0
32https://dicoagroecologie.fr/encyclopedie/agriculture-paysanne/#:~:text=D%C3%A9finition%20%3A,le%20fonctionnement%20de%20l’exploitation.
33https://reporterre.net/Dans-le-lot-un-projet-agrivoltaique-divise-Montcuq-en-Quercy-Blanc
34https://transfert.confederationpaysanne.fr/f.php?h=2hpjWcZ3