Antoine Nogier et Sun’agri font main basse sur les Pyrénées-Orientales
« Quand vous êtes dessous, il y a une structure, je ne trouve pas cela moche ». Ainsi s’exprime le patron du lobby France Agrivoltaïsme, Antoine Nogier, chantre médiatique de « l’ agrivoltaïsme exigeant-harmonieux-vertueux » avec sa boite Sun’ Agri… (janvier 2023)
« Quand vous êtes dessous, il y a une structure, je ne trouve pas cela moche, ensuite s’il y en avait dans tous les champs à perte de vue, c’est comme les éoliennes, je trouverais cela moche bien sûr. Je dirais « non mais cela suffit, j’en ai ras-le-bol ». Ainsi s’exprime le patron du lobby France Agrivoltaïsme, Antoine Nogier, chantre médiatique de « l’ agrivoltaïsme exigeant-harmonieux-vertueux » avec sa boite Sun’ Agri, pour qui a été écrit la loi du sénat en faveur de « l’ agrivoltaïsme » aujourd’hui intégrée à la loi d’accélération de la production des énergies renouvelables.
Sun’ Agri n’est pas n’importe qui. Depuis une décennie 25 millions ont été investit dans des programmes de recherches conjoints avec l’INRAE. Ainsi « l’histoire de l’agrivoltaïsme en France commence en 2009 par la rencontre d’Antoine Nogier, président et fondateur du groupe Sun’R et de Sun’Agri, et de Christian Dupraz, chercheur en Agroforesterie à l’INRAE »1.
Pour mieux faire passer leur projet abscons, les promoteurs de ce concept marketing n’ont cessé d’y ajouter des critères afin d’essayer de distinguer cet « agrivoltaïsme » du vulgaire photovoltaïque au sol. Leur but étant que 150 000 hectares soient recouverts. Une surface revendiquée tant par le Ministère de la Transition que par ce lobby.
Ainsi, 7 labos de l’INRAE et 14 chercheurs à temps plein ont bossé des années avec Sun’ Agri, mais aussi avec Photowatt et Itk, et ce avant que Sun’agri ne se lance sur le marché. Aujourd’hui Sun’ Agri est une succursale d’ Eiffage, et présente son « programme 3 » subventionné à 7 millions par l’ADEME et qui lui permet la construction de démonstrateurs à l’ échelle commerciale.
Raflant 75% des appels d’offre de la CRE, Nogier fanfaronne et dénonce « les cow-boys qui parcourent la pampa » des autres entreprises, mais achète pourtant des terres via sa boîte, à minima 80 hectares dans les Aspres, refuse de l’assumer et s’en défend en se présentant comme « engagé dans une initiative à but social consistant à remettre en état d’exploitation des vignes délaissées ou sans repreneur dans une exploitation modernisée et pérennisée ». Auprès de ses pairs, il se fait pourtant plus direct « nous sommes maintenant dans le business. Nous sommes développeurs et investisseurs, c’est une activité très capitalistique ».
Et alors que sa directrice prône la vertu, Sun’Agri fait un Recours Gracieux pour imposer ses 2 projets aux élu.es de Terrats qui avaient délibéré contre à l’unanimité. Nogier, boute-en-train, tente alors un calembour « la mairie ne s’oppose pas. Il y a eu des questionnements au début. Sur Terrats il y a pas de sujet, elle est plutôt pour la mairie. L’agrivoltaïsme c’est assez peu connu donc cela suscite beaucoup d’interrogation, et cela nécessite beaucoup de pédagogie ». Et bien que l’agrivoltaïsme ne fasse qu’ajouter à la dépendance à l’agroindustrie une autre dépendance aux industriels de l’énergie, Nogier se fait renard dans un poulailler : « Il y a autant de systèmes agricoles que d’agriculteurs. Tout le monde a le droit de faire des choix différents ».
Quant à son intermédiaire local, Christophe Koch, s’il fut à l’origine de la première centrale agrivoltaïque d’Europe qui a reçu les honneurs de Greenpeace, il prône l’autonomie des pratiques agronomique pour lui-même et contribue à aliéner les autres paysans et paysannes aux algorithmes de sun’agri…
- Mais du coup, est ce que vous ne pensez pas que les panneaux ne sont pas forcément à la bonne place et qui faudrait favoriser une véritable agroforesterie, une diversification des parcelles en termes de cépages et d’arbres fruitiers ?
- Mais bien sûr, mais bien sûr.
- Mais pourquoi ne pas faire chez les autres ce que vous faite chez vous ?
- Parce que chez moi je peux décider, je suis décideur.
- Oui mais là on en revient au point de départ. Vous perdez l’AOC, donc quitte à perdre l’AOC dans ces projets de sun’agri, autant mettre des arbres et des abricotiers, non ?
- Non mais enfin là c’est pas moi qui décide.
- Mais vous travaillez avec ces sociétés-là.
- (silence) non mais moi je conseille…
On pourrait lui conseiller d’arrêter de mettre en place des projets à 800 000 euros par hectare. Des centrales industrielles dont « l’algorithme qui gère à distance depuis le siège lyonnais de l’entreprise maîtrise parfaitement le comportement de la plante ». Nogier fanfaronne que « Sun’ Agri c’est un fournisseur de technologie d’intelligence artificielle. Notre métier c’est celui-là, on est une boîte de technologie ».« Le cœur du réacteur de Sun’Agri, c’est le numérique »2jubile t’il par ailleurs. Pourtant « je prétend que nous on essaye de maintenir les terroirs tels quels. Non je ne suis pas de ceux qui penses que les systèmes connectés, la technologie sont l’ennemi de l’agriculture, au contraire ils peuvent aider l’agriculteur à dormir correctement sur ses deux oreilles, à avoir moins de stress et à faire un métier qui est extrêmement difficile. Ce sont des agriculteurs qui se sont réappropriés leur agriculture, leur métier et la technologie les aide »assène le PDG de Sun’ Agri. Il ose aussi présenter le salarié agricole qui sera sous ses panneaux comme un acteur indépendant alors que la société d’exploitation agricole est détenue par Sun’Agri.
En termes de convergence d’intérêts dans les Pyrénées-Orientales, l’écosystème « vertueux » des barons de la FNSEA et de la Coordination Rurale – dont Sun’ Agri recueille les fruits – fiche une insolation. Si le parrain de la FDSEA, Bruno Vila fort de ses millions, de ses 50 sociétés donc 5 agrivoltaïques, surclasse de loin son compagnon de route Philippe Maydat, président de la Coordination Rurale qui ne détient que 2 petites locations, ce dernier se permet une paella conviviale sous les serres de Ternergie. Ces deux syndicats sont présents à la Chambre d’agriculture, à la SAFER, à la CDPENAF, des instances décisives pour les projets de Sun’ Agri.
7 mois après le début de ce papier dont la version courte parue dans L’Empaillé a été lue par les commerciaux de Sun’Agri qui cherchent maladroitement à s’en défendre, la mairie de Fourques se déclare contre le 3eme projet de Sun’ agri et cherche à le bloquer. Face à la boîte d’Antoine Nogier qui n’avait pas prévenu des habitant.es que les chantiers et les lignes électriques allaient passer dans leurs terrains, des chaînes empêchent Sun’Agri d’accéder aux chantiers. La première réunion d’information contre la succursale d’ Eiffage se tiendra à Terrats le 28 février à 18h.
Dans les Aspres, tout le monde est en train de détester Sun’ Agri.
Ou ci-dessous
Première partie
« Contre l’agrivoltaïsme, l’autonomie paysanne »
L’Empaillé n.7
Dessin de Marco pour l’Empaillé
Depuis quelques années, les panneaux photovoltaïques pullulent dans les champs. La condition à ces installations ? Que quelques brebis continuent de pâturer dessous… Le monde paysan étant encore dubitatif, le service marketing de l’agro-industrie sort de son chapeau « l’agrivoltaisme », pour faire croire aux bienfaits de l’association entre animaux, cultures et panneaux métalliques. Et puisque ce n’est jamais assez, les espaces naturels et forestiers sont aussi concernés. Si plus de 200 projets ont été autorisés en 2021, de nombreux collectifs refusent de voir leurs campagnes couvertes de panneaux.
Seconde partie.
Les cultivateurs de kilowatts font main basse sur les Pyrénées-Orientales
Une version courte est parue en décembre 2022 dans L’Empaillé n.8
« Tout le monde déteste Sun’ Agri »
Dans notre précédent numéro, nous présentions comment les margoulins de l’agro-industrie tentent de transformer les paysan.nes en cultivateurs de kilowatts. Afin d’y parvenir les financiers misent sur le Cheval de Troie de l’agrivoltaïsme. Cela tombe bien, le meilleur jockey du moment se nomme Sun’Agri, et se dore sous le soleil des Pyrénées-Orientales…
Dessin de Pierro pour L’Empaillé !
La solidarité des campagnes avec les villes. Voilà le nouvel argument d’ élu.es en mal d’écologie pour coloniser des centaines de milliers d’ hectares avec des panneaux photovoltaïques. Car lorsque Macron souhaite multiplier par dix la capacité de production photovoltaïque de la France pour dépasser les 100 gigawatts en 2050, cela suppose de couvrir de panneaux entre 100 000 et 200 000 hectares, soit « 0,2% à 0,4% du territoire » français, précise le ministère de la Transition énergétique1. Ce qui représente le département de l’ Essonne ou des Yvelines entièrement recouvert, ni plus ni moins.
Sun’agri, Llupia, Pyrénées-Orientales. Poiriers sous une culture de kilowatts.
C’est pourquoi, au sein de la loi dite d’accélération de la production d’énergie renouvelable votée cette automne, l’ agrivoltaïsme fait diversion. En effet si tous les regards sont tournés vers ce terme marketing qui recouvre des projets se présentant comme vertueux, mais qui n’en restent pas moins des installations industrielles sur des terres agricoles à dénoncer comme telles, cette loi n’interdit en rien les projets PV sur les terres agricoles naturelles et forestières qui ne correspondraient pas à la définition très lâche de l’agrivoltaïsme portée par le gouvernement. Bref, les divers projets se cumuleront, et l’équivalent d’un département va se couvrir de panneaux sans que les grandes organisations environnementales telle France Nature Environnement et Greenpeace n’y trouve rien à redire. Pire comme nous le verrons, cette dernière ONG a soutenue la première centrale agrivoltaïque d’ Europe en 2015 dans les Pyrénées-Orientales.
Et si les industriels agrivoltés clament la bouche en cœur être là pour aider les paysan.nes dans un contexte de changement climatique, François Pelras, développeur depuis plus de 5 ans de sites photovoltaïques chez Eneragri se fait plus franc du collier : « C’est d’abord une réponse aux demandes exprimées par les marchés de l’alimentation et de l’énergie et où l’agriculture doit jouer un rôle majeur ! Si l’on souhaite de l’énergie propre et photovoltaïque, il faut utiliser la voie agricole, c’est primordial ! » 2. Ce qui rejoint le constat dénoncé pat la Confédération Paysanne « l’ agrivoltaïsme éloigne de l’autonomie : il ajoute à la dépendance au complexe agro-industriel (industries de la grande distribution, des engrais, pesticides et semences, machines agricoles, banques, organisations syndicales défendant leurs intérêts…) une autre dépendance, plus moderne et consensuelle car porteuse de l’image de l’énergie renouvelable ».3
L’agrivoltaïsme prospère sur la pauvreté du monde paysan
Car bien souvent les paysans et paysannes qui acceptent ces projets sont endetté.es, ou ne sont pas rémunéré.es à la juste valeur de leur travail. Dans les P-O Jean-Marie Nadal, propriétaire et viticulteur du Mas de l’ Eule, refuse de donner les chiffres pour le loyer qu’il touche, mais déclare: « Y’a pas photos, on perd de l’argent actuellement avec les vignes, alors qu’avec la centrale solaire on a actuellement un petit revenu. Ce sont des terrains qui n’étaient plus cultivés. Il y avait eu de la vigne dans le temps, mais bon, des vignes qui étaient en perte de vitesse étant donné que c’était des vignes en vin de table qu’on n’arrivait pas à valoriser correctement ».4
Même son de cloche en Charente, lors d’un reportage de France 2 en 2022. Pascale Montigaud, agricultrice à Bors-de-Montmoreau dans les Charentes, a accepté l’installation de ces panneaux sur 33 hectares de ses champs. Elle touche ainsi un loyer de 2500 euros par an et par hectare, soit une somme garantie annuelle de 38 000 euros. Elle déclare :
«- Jamais elles auraient rapportées autant ces terres.
-Avant elles vous rapportaient quoi ces terres ? Questionne Fr 2.
– Des dettes » leur répond l’agricultrice 5
Bref, comme l’exprime très clairement un agriculteur portant le projet Montcuq-en-Quercy « avec ce projet, je perdrai l’argent de la PAC mais je récupérerai un loyer à la place, plus intéressant.»6
C’est ainsi que dans son rapport qui légitime l’ agrivoltaïsme, l’ ADEME met paradoxalement en avant que « les principaux atouts de ces projets sont l’accès à des structures agricoles à coûts nuls (…) l’accès à du foncier supplémentaire (…) le soutien économique à la valorisation d’un foncier (…) la pérennisation d’une exploitation ». Ainsi nulle trace d’écologie dans les principales raisons des paysan.n.e.s, seules existent des difficultés financières sur lesquelles prospèrent les industriels.7
Que devient le métier de paysan.ne ? Si à l’instar de l’Atelier Paysan, défendre l’autonomie paysanne « c’est affirmer l’exigence de la délibération politique et populaire dans la production de l’alimentation, dans les choix technologiques en agriculture, dans la répartition de la terre à celle et ceux qui la travaillent (…) c’est introduire la nécessité d’une réflexion collective sur les besoins et les moyens qu’on met en œuvre pour les satisfaire, d’ une autolimitation » l’on ne peut que trouver un contre-modèle aux projets à 800 000e l’hectare géré par intelligence artificielle de Sun ‘AGRI, l’entreprise la plus médiatique du secteur. Et si « L’autonomie (est entendue) comme « un désir de reprise en main directe de nos conditions matérielles d’existence »8 , rassurons-nous, l’Intelligence Artificielle qui gère les parcelles de Sun’ Agri reprend en main les désirs du monde paysan.
L’ADEME en plein doute existentiel
Dans son rapport qui légitime l’agrivoltaïsme9, l’ADEME a pris un bon coup de soleil et se met à divaguer : « ces recommandations visent à encourager et favoriser le déploiement des projets agrivoltaïques ». Elle explique pourtant que « la réduction de la lumière liée à la présence de modules PV constituent la principale contrainte écophysiologique sur la productivité des plantes (…) la littérature sur les impacts des modules sur la distribution de l’eau et l’érosion est relativement limitée ».10
Elle explique aussi, quant à la diminution de l’évapotranspiration, soit-disant avantage de l’ agrivoltaïsme « que cette amélioration n’est pas systématique »11.
Dans le résumé technique de ce rapport l’ADEME reconnaît que « la mise en place de panneaux a en général, des effets neutres ou négatifs sur la production agricoles »12. Notons qu’elle ne mentionne pas des effets positifs comme étant généralement observés… mais négatifs et parfois neutres sur la production.
Malgré cela, l’ADEME en arrive à conclure que si le manque de lumière est un facteur limitant la croissance des plantes « selon les cas, l’amélioration de l’efficience de l’eau peut contrebalancer les effets d’ombrages ». « Selon les cas »… on suppose que l’ADEME, via son observatoire, viendra démanteler un projet dans lequel cette efficience productive pataugerait dans l’ombrage des panneaux. L’ADEME avance au « doigt mouillé » se séchant au soleil…
Continuons, L’ADEME dit pourtant prendre en compte « la capacité d’adaptation de la structure photovoltaïque aux évolutions de cultures agricoles et d’itinéraires techniques »13 : l’on ne voit pas comment cela deviendra possible une fois des dizaines d’hectares de panneaux en place. Ainsi la Confédération Paysanne nationale lui répond : « Nous dénonçons le rapport de l’ADEME qui prône des projets agrivoltaïques « flexibles » et « adaptables » alors qu’il apparaît impossible qu’ils le soient dans les faits : si un·e paysan·ne décide de passer de l’élevage bovin à l’arboriculture de plein vent ou au maraîchage, les sociétés de PV – souvent des multinationales – viendront-elles changer la configuration des panneaux ? Bien sûr que non… »14
Pis d’ailleurs dans son rapport l’ADEME avoue que « les retours d’expériences collectés ont mis en lumière des des modifications potentiellement profondes des itinéraires techniques et des productions des exploitations ». Elle n’est plus à une incohérence près !
Le texte de loi des sénateurs « en faveur de l’agrivoltaïsme », précédemment analysé15, repris en ce projet de loi ENr, était un mauvais décalque d’un déjà bien mauvais rapport de l’ADEME, que nous avons lui aussi critiqué16. Mais bien mieux que les centaines de pages de rapport qui multiplient les définitions et concepts abscons afin de légitimer cette notion, rappelons que l’agrivoltaïsme dans les faits, et tel que défendu par l’ADEME, cela donne cela :
Cette inauguration de la centrale de Llupia dans les Pyrénées-Orientales, construite par Sun’ Agri, et cofinancée par la région Occitanie, démontre que les cols blancs admirent plus la qualité de l’acier galvanisé que les poiriers, et aliènent le monde paysan à leur technologie connectée – la présence du smartphone sur la grande affiche en témoigne.
Le rôle des élu·es de la Région issu·es des P-O pose aussi question. La vice-présidente Agnès Langevine souhaite faire sauter tous les verrous de l’implantation du PV17, c’est donc tout naturellement que sa collègue qui siège à la SAFER, Judith Carmona, se retrouve radieuse et côte à côte avec Antoine Nogier (cravate rouge) pour couper le ruban d’inauguration de la centrale de Sun’ Agri à Llupia. Alors même que la Confédération Paysanne affirme que « notre métier n’est pas de produire de l’énergie » et qu’elle dénonce Sun’ Agri18, cette ancienne secrétaire nationale du syndicat a refusé de s’exprimer.
Des brebis sous tensions qui n’agnellent plus
Outre l’atteinte à la vocation nourricière de la terre, au foncier, au cadre de vie, à l’autonomie paysanne, une autre problématique apparaît. En Aveyron un premier témoignage sur les effets de l’électricité des panneaux me parvient :
« J’avais emmené des brebis pleines et je les ai ramenées vides. Y a 54 agnelles qui avaient connues le bélier 2 mois avant les avoir emmenées. Elles sont restées 1 mois et demi là bas, je les ai ramenées, normalement elles auraient dues agneler. Les béliers je les ai pris pour saillir mes brebis en fin d’année, il y a eu aucun problème, et sur 54 il y en a aucune qui a mis bas, c’est étonnant. Normalement j’ai toujours un carton plein. Mes bêtes quand j’allais les voir dans les prés, je les change tous les jours ou tous les deux jours de pâtures, quand elles ont plus d’herbe elles me suivent. Là je les ai emmenées dans les parcs, il y avait de l’herbe en pagaille et quand j’allais vers la porte elles me suivaient, elles voulaient sortir. De toute façon j’y allais, moi j’avais mal à la tête, et j’y suis allé avec des copains et ils avaient les mêmes symptômes ».
Un problème bien connu de l’association Animaux Sous Tension19 qui lutte depuis des décennies contre les ravages des basses fréquences de l’électricité et des antennes-relais sur les animaux d’élevage. Ainsi le 2 juin 2022, le tribunal de Coutances (Manche) a condamné la société Réseau Transport Électricité (RTE) à verser un peu plus de 460 000 € à une exploitation laitière de la Manche, reconnaissant la responsabilité de RTE et une bonne partie des préjudices attribués au passage de la ligne THT aux abords de l’exploitation agricole. Autre exemple, la préfecture de la Creuse rappelle que « 5 exploitations agricoles (totalisant 40 vaches laitières) connaissant des problèmes sanitaires importants (baisse de productivité, dermatites, avortement, décès inexpliqués et/ou problèmes comportementaux) dans un environnement à risque électromagnétique élevé (présence à proximité d’éoliennes, lignes à moyenne et haute tension et/ou d’antennes relais de téléphonie mobile… »20.
Dans l’Orne, c’est Enedis qui a été condamné à verser 140 000 euros à un agriculteur dont la production de lait a drastiquement baissé après l’installation d’une ligne souterraine et d’un transformateur à proximité de son élevage, rapporte France Bleu Normandie « C’est une reconnaissance pour moi, mais aussi pour tous les autres éleveurs victimes », a réagi l’agriculteur Alain Crouillebois, installé à La Baroche-sous-Lucé. L’agriculteur affirme qu’à partir de 2011 et l’installation d’une ligne souterraine de 20 000 volts ainsi qu’un transformateur électrique à quelques mètres de son exploitation, la production de lait de ses vaches a drastiquement baissé. « Je perdais 50 000 euros à l’année »21
Ajoutons que le député centriste du Maine-et-Loire, Philippe Bolo a écrit un rapport sur les effets des ondes et des animaux « Aujourd’hui, il y a des élevages partout en France qui sont dans des situations très complexes » constate-t-il, « il y a même des cas dramatiques avec la mort d’animaux, alors quoi qu’on en pense, ça en fait un sujet à regarder de près, car des questions se posent. Ce n’est pas dans la tête des éleveurs »22
Mais qu’en est-il des champs électromagnétiques créés par les parcs de PV ?
A l’automne 2022, la Mission Régionale Autorité Environnementale de Bretagne, dans son avis sur le projet de centrale photovoltaïque au sol sur la commune du Folgoët aborde pour la première fois cette problématique :« Il aurait pu être intéressant qu’une simulation du champ électromagnétique soit effectuée au niveau des habitations les plus proches et qu’un lien ou qu’un contact pour obtenir des éléments d’information complémentaires sur ce sujet soit proposé, en particulier pour des personnes électrosensibles. »23
La LPO dans son rapport sur la biodiversité et les centrales PV parle aussi des effets des ondes artificielles, cette fois-ci lorsque les câbles passent dans l’eau : « si le câble est installé dans la colonne d’eau, la création de champs électromagnétiques peut affecter le comportement des poissons et l’orientation spatiale de plusieurs autres groupes d’espèces aquatiques »24
Dans les Aspres, l’âpre goût du photovoltaïque
Commune de Terrats, chemin de rando menant vers le Mont Canigou.A droite le terrain défriché par sun’ agri pour une centrale de 3,7 ha.
Les « Aspres » sont une région caillouteuse et aride qui forme les premiers contreforts du Mont Canigou dans les Pyrénées-orientales catalanes. Nombre de vignobles s’y sont développés et recouvrent un tiers des surfaces de la Communauté des Communes. La cave coopérative du Terrassou y défend des paysages qui « sont à nul autre pareils. Sous la bienveillance du Mont Canigou, enneigé une grande partie de l’année, les collines se parent de vignes, de champs d’oliviers et de garrigues. Au loin, les reflets de la mer Méditerranée scintillent dès les premiers rayons de soleil. Ce côté sauvage, brut et préservé est la marque des Aspres ». La Communauté des Communes met quant à elle en avant « les paysages de vignes, les villages, la garrigue, les forêts de chêne-lièges, … et toujours la vue sur le Canigou. Les Mas des Aspres, (ses) hébergements touristiques de charme associant architecture à nature et culture ». Pourtant des hectares de panneaux métalliques vont venir cacher le Canigou. Et si les industriels clament tous la bouche en cœur que leurs projets vont s’intégrer visuellement, le cofondateur et président d’ Ombrea Christian Davico explique pourtant que « l’ impact visuel (sur des surfaces de 5-7 hectares) est réel »25
Le département des P-O est déjà tristement connus pour le désastre des serres photovoltaïques. Comme le rapporte Alternatives Économiques « Les premiers projets lancés au début des années 2010 en agrivoltaïsme ont été un fiasco. En 2018, une enquête de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) des Pyrénées Orientales annonçait que parmi toutes les« serres photovoltaïques » que compte ce département pionnier, les deux tiers ne couvraient plus aucune activité agricole ».26
En 2020, le préfet de région Occitanie Chopin, en déplacement dans les P-O pour inaugurer une centrale sur une ancienne décharge, tente de bercer son auditoire de belles paroles et semble ignorer que les friches agricoles… sont des terres agricoles qui ont vocation à le redevenir : « c’est intelligent de le faire sur des friches agricoles (…) parce que justement cela n’utilise pas des terres agricoles ni des terres qui pourraient servir à autre chose. Le PV est prédestiné a aller sur des terrains comme cela, de manière à pas priver nos agriculteurs de terrains où l’on puisse faire autre chose »27
Pourtant la même année, 31 projets photovoltaïques ont été soumis à la CDPENAF et 9 ont reçus un avis favorable. En 2021, sur 31 projets 17 ont reçu un avis favorable.
L’Intelligence Artificielle de Sun’ Agri
C’est pourtant en cette région caractérisée par ses paysages préservés qu’ Antoine Nogier, le médiatique PDG de Sun’R Holding qui détient Sun’Agri, Sun’R Power et Volterres, et président du lobby France Agrivoltaïsme, choisit un de ses principaux terrains de jeu.
Sun’ Agri n’est pas n’importe qui. Depuis une décennie 25 millions ont été investit dans des programmes de recherches avec l’INRAE : « L’histoire de l’agrivoltaïsme en France commence en 2009 par la rencontre d’Antoine Nogier, président et fondateur du groupe Sun’R et de Sun’Agri, et de Christian Dupraz, chercheur en Agroforesterie à l’INRAE » 28.
Le concept fumeux, le voici à l’origine tel que Sun’ Agri le relate dans ses permis de construire :
Depuis, les promoteurs de ce concept marketing n’ont cessé d’ajouter des critères afin d’essayer de distinguer cet « agrivoltaïsme » du vulgaire photovoltaïque au sol et de faire accepter l’idée que 150 000 hectares allaient être recouvert comme le patron de Sun’ Agri le souhaiterai.
Ainsi, 7 labos de l’INRAE et 14 chercheurs à temps plein ont bossé des années avec Sun’ Agri, mais aussi avec Photowatt et Itk, et ce avant que Sun’agri ne se lance sur le marché.
Aujourd’hui Sun’ Agri, succursale d’Eiffage, présente son « programme 3» : merci l’INRAE !
De multiples partenariats sont signés entre Sun’ Agri et les grands industriels du renouvelables tels Engie Green, Boralex. Cecile Margherini, directrice de Sun’ agri précise quant au partenariat avec Qair qu’il est « pour nous un symbole d’industrialisation de la filière à grande échelle (…) La France est pionnière de l’agrivoltaïsme mais aujourd’hui, nous travaillons aussi avec deux autres pays : Israël où nous avons ouvert une filiale car le pays va lancer la construction de 150 démonstrateurs sur une multitude de cultures, et l’Italie (…). A l’international, Qair peut être un vecteur de développement pour Sun’Agri »29.
Des vignes photovoltées.
Vigne agrivoltée de Sun’ Agri au Domaine de Nidolère à Tressère dans les P-O.
Sun’ Agri installe son laboratoire sur vigne « viti-photovoltaïque » au domaine de Nidolères à Tresseres dans les P-O, ce qui serait « la première centrale agrivoltaïque au monde », tant pis pour celle d’Ortaffa dans le même département qui revendiquait être la première d’Europe. Pis à la base, des 2 centrales, il y a le même « intermédiaire », Christophe Koch, sur lequel nous reviendrons.
Mais Jean Blin de l’association Frêne dans les Pyrénées-Orientales questionne le fonctionnement de cette centrale PV à Nidolères: « Aude Chéron et son équipe de FR3 n’ont-ils pas vu les longs tuyaux noirs d’arrosage au goutte à goutte qui courent au pied des vignes tout le long des rangs sous les ombrières photovoltaïques ? ». Antoine Nogier, que je questionne à ce sujet, confirme la présence de ces tuyaux d’irrigation. Vous avez dit « panneaux » pour s’adapter au changement climatique ?
Aussi, Sun’ Agri, dans son projet sur vigne à Terrats explique que la durée de vie du vignoble est de 30 années… tout comme celui des panneaux. Cela tombe bien ! Mais cette justification de la présence de panneaux ne tient que d’un point d’une vigne industrielle, car un cep peut très bien vivre plus de cent ans (et en condition naturelle bien plus). Sun’ Agri promeut une industrialisation de l’agriculture. D’ailleurs et comme le rappelle la Conf « quelle que soit sa surface, un parc photovoltaïque sur des terres agricoles et naturelles, est une installation de nature industrielle »30
Quant à Kees Van Leeuwen, professeur de viticulture à Bordeaux Sciences Agro et à l’Institut des sciences de la Vigne et du Vin, il dénonce l’irrigation des vignes : « quand on parle d’irrigation des vignes, l’on peut parler d’une « mal adaptation », mais il y a une très grande culture dans le bassin méditerranéen de culture sèche, on sait faire de la vigne dans des conditions bien plus sèche qu’en France, quand on va en Espagne dans la région de l’Aragon on fait de la vigne avec des cépages et des portes greffes adaptés, des systèmes de conduites adaptées à des pluviosités de 350mm d’eau par an et la vigne se porte très bien et le vin d’excellente qualité, car l’irrigation de la vigne, on peut dire on apporte très peu d’eau, mais très vite commencer à irriguer la vigne c’est de l’ordre de 100 mm par an ce qui représente 1000 000 de litres par an et par hectare, donc si on multiplie cela par 700 000 hectares en France, cela fait 700 milliard de litres d’eau d’irrigation, je sais pas où on va les trouver. Au contraire il y a un historique de savoir faire de culture sèche dans le bassin méditerranéenne qu’il faut absolument préserver et défendre parce sinon on va faire un catastrophe écologique. L’enherbement est une bonne stratégie (pour lutter contre les sécheresses dans les vignes), comme l’agroforesterie (…) la gestion des surface foliaire. Il y a la conduite historique que l’on a malheureusement un peu abandonnée, c’est la conduite en gobelet qui était très répandue dans le bassin méditerranéen qui rend la vigne incroyablement résistante à la sécheresse. On cultive la vigne comme des petits buissons, qui sont typiques des paysages du sud de l’Espagne et de la France aussi, où les raisins sont protégés par l’ombre des feuilles C’est un système que les viticulteurs ont mis des centaines d’années à mettre au point pour avoir un système de conduite extrêmement résilient par rapport à la sécheresse et la vigne peut très bien être cultivée avec des précipitations de 400 mm d’eau par an voire un petit peu moins.»31
Oui mais, le gobelet, il produit pas d’électricité !
Sun’ Agri, dans son projet viticole de Terrats, se défend d’enlever de l’homogénéité dans la redistribution de l’eau de pluie ;
Pourtant l’ADEME, dans son rapport de 2021, explique aussi que « la littérature sur les impacts des modules sur la distribution de l’eau et l’érosion est relativement limitée (…) les modules génèrent de forts contrastes de répartition de l’eau dans le sol avec la formation d’un bulbe d’eau dans le sol à l’aplomb du panneau (…) les références bibliographiques sont incomplètes et difficilement comparables (il y a) un manque de retours expérimentaux sur des séries pluriannuelles ».32
Qui plus est, dans un rapport d’octobre 202233, La LPO, aidé de l’OFB et de l’ADEME, met en avant une revue d’étude dont certaines sur cette question qui montre que « Les installations d’énergie solaire sont néanmoins parfois associées dans la littérature à des risques de pollutions physico-chimiques des sols ou de l’eau » et surtout que le régime de l’évapotranspiration, du entre autre au changement de répartition de l’eau de pluie dans le sol affecte le micro-climat de la parcelle. Ainsi « Barron-Gafford et al. (2016) montrent l’existence d’un effet « îlot de chaleur » des CPV comparable à ceux observables en milieu urbain. Une augmentation de la température de 3 à 4 °C est observée la nuit au-dessus d’une CPV de 1 MW implantée en milieu semi-aride composée d’un mélange clairsemé de graminées, de cactus et d’arbustes ligneux occasionnels. Cette augmentation est comparable à celle mesurée sur un parking de taille similaire utilisé comme site témoin. Cet effet est accentué lorsque l’implantation de la CPV nécessite des opérations de défrichement ou réduit la hauteur ou la densité de végétation sur le site
Antoine Nogier, le patron « exigeant-harmonieux-vertueux » du lobby de France Agrivoltaïsme
Depuis des années que je travaille sur ce sujet, le nom d’Antoine Nogier ne cessait de passer dans les médias nationaux, et jamais une critique ne lui était adressée. Le médiatique PDG de Sun’ R se présente comme vertueux et ne cesse de dédaigner ses concurrents. Nous verrons qu’il n’a rien à leur envier.
En août 2022, je me décide à l’ appeler. « Mes engagements sont sincères, reconnus et utiles à la profession » me déclare t-il. Que cela soit utile à la profession, personne n’en doute, et là est le cœur du problème. C’est d’ailleurs au point qu’il déclare auprès de Greenunivers « nous sommes maintenant dans le business. Nous sommes développeurs et investisseurs, c’est une activité très capitalistique ». Voilà qui est clair et cela ne va cesser de s’éclairer au fil de cette enquête.
Commençons par ce qu’aucun média servant de faire-valoir à Nogier n’a relevé.
En 2021, le Crédit Agricole rentre au capital de Sun’R via ses fonds d’investissement Idia et Sofilaro. Puis quelques jours après mon entretien avec lui, l’arrivée du communiqué d’ Eiffage éclaire d’un nouveau jour cette entreprise : « Eiffage Concessions, est entré en négociations exclusives en vue de détenir plus de 80 % du Groupe Sun’R, le solde du capital étant conservé par le fondateur Antoine Nogier et l’équipe de management. L’opération sera réalisée par le rachat d’actions existantes simultanément à une augmentation de capital entièrement souscrite par Eiffage. Au travers de cette acquisition, Eiffage entend capitaliser sur l’expertise du management et la culture d’innovation des équipes du Groupe Sun’R pour accélérer son déploiement dans les énergies renouvelables.»34. Interrogé sur le sens de cette future opération, Antoine Nogier évoque « une alliance avant tout industrielle »35
En décembre 2022, Eiffage officialise son rachat de Sun ‘agri : « Au-delà des nombreuses perspectives de synergies industrielles et commerciales, cette union est d’abord née d’une rencontre avec les dirigeants d’Eiffage et du partage de valeurs et d’une culture commune, compatible avec notre raison d’être » déclare Antoine Nogier. 36
Quand Eiffage, géant du BTP et des autoroutes, entend capitaliser sur l’expertise et l’expérience de Sun’R, le monde paysan peut commencer à se poser des questions. D’ailleurs pourquoi Eiffage et Sun’R ne mettent pas des panneaux sur les autoroutes ? Vinci et les autres sont-ils plus âpres dans les négociations que les paysans des Aspres ?
« On est une boîte de technologie »
Revenons vers Antoine Nogier qui me présente ainsi son entreprise : « Nous ne sommes pas un producteur d’électricité, Sun’Agri n’est pas l’investisseur des projets, Sun’ agri : ses clients c’est les agriculteurs. Sun’ Agri c’est un fournisseur de technologie d’intelligence artificielle qui consiste à piloter une structure pour maximiser le bien-être de la plante. Notre métier c’est celui-là, on est une boîte de technologie. De temps en temps les agriculteurs nous demande de trouver des investisseurs. On est pas rémunéré par la vente d’électricité. On vend un abonnement annuel de pilotage des modules. On vit pas de la vente d’électricité car sinon on aurait un énorme conflit d’intérêt parce que l’on ne serait pas crédible. La crédibilité de nos solutions c’est que l’on est indépendant du producteur d’électricité ».
Sun’ Agri, poirier de Llupia. Détail de l’installation de l’intelligence artificielle.
Agathe Triaire, chargée des Enr à la Chambre d’Agriculture des PO me précise quant à ce modèle économique de Sun’ Agri « ça c’est leur soi-disant business modèle. Ils veulent se positionner comme un prestataire de service. Donc il y aurait un développeur qui peut être Engie, Total, n’importe qui, qui fait tout le reste, qui cherche le foncier, etc… et Sun’ Agri loue ses services de pilotage grâce à des algorithmes au point, patati patata… »
En effet Sun’ Agri a signé divers partenariats dont un avec Engie en 2021. Qui plus est Volterres, filiale de Sun’agri, est aussi un fournisseur d’électricité -allez comprendre. Et l’existence de sa Maison Mère complexifie le tableau : car Sun’R Infrastructure, une société dirigée par Antoine Nogier, et ses 66 établissements ont pour objet « en France ou à l’étranger : La construction, le financement et l’exploitation d’une centrale photovoltaïque en vue de revendre l’électricité produite ». On fait mieux comme indépendance vis à vis du producteur d’électricité !
A quoi l’on peut rajouter l’existence des Sociétés Agrivoltaïques d’ Occitanie et de SH2 (anciennement SPES de Gascogne-Chavornay), dirigées par Nogier. Ces deux sociétés ont aussi dans leurs statuts « La construction, le financement et l’exploitation d’une centrale photovoltaïque en vue de revendre l’électricité produite »37. Aujourd’hui SH2 a pour objet « la prise de participations en fonds propres ou quasi-fond propres au capital d’entreprise d’électricité ».
Bon allez passons, et continuons avec Antoine Nogier qui m’assure être plutôt contre le modèle des loyers agricoles versés par les industriels de l’énergie aux agriculteurs et dénonce la spéculation foncière amenée par les projets PV… alors même que tel est l’effet de ses projets dans les Aspres comme nous le verrons :
« On est plutôt pour des solutions qui sont sans loyers, pour deux raisons, parce que l’on veut que l’agriculteur soit l’investisseur et ensuite le loyer cela augmente le prix de la terre, cela crée de la spéculation. Nous c’est un service que l’on rend à l’agriculteur, vous payez pas pour un service », me déclare le François d’Assise de l’intelligence artificielle.
Mais « être plutôt pour des solutions qui sont sans loyers », ne signifie pas forcément être catégoriquement contre. Et puis comment un agriculteur pourrait-il investir 800 000 euros par hectares ? Nogier s’adresse donc au gros agriculteurs ou contribue à les rendre dépendant d’autres investisseurs.
Lors de notre entretien, et avant que nous attaquions le vif du sujet, il continue sa litanie sur l’agrivoltaïsme responsable « Le premier but n’est pas de produire de l’électricité mais celui de protéger les cultures ». Rappelons-lui tout de même que l’on puisse considérer qu’il convient de protéger les cultures… de la production d’électricité.
Je perds donc patience et interroge Nogier : est-ce que Sun’R Holding en arrive à être propriétaire de terres agricoles et viticoles tels les autres industriels de l’énergie desquels il tient tant à se démarquer ?
«- Non, Sun’R n’est pas propriétaire de domaine viticole.
– Et à Fourques, les 14 hectares rachetés par Sun’ R ?
– Non c’est une erreur, Sun’R n’a jamais acheté des domaines viticoles, de qui tenez-vous cette information ? Faut faire attention à ce qui se dit, Sun’R n’a jamais achetés de domaine viticole, Sun’ Agri non plus.
– Ah d’accord, je fais bien de vérifier…»
Bon beh justement, je vérifie de nouveau : le 13 juin 2022, la Safer a envoyé à la mairie de Fourques l’avis de rétrocession de 14,5 hectares aux lieux-dits « El prat », « La miranda » « Las comes », auprès de la SCI Nos Terroirs Solaires Pyrénées-Orientales (SCI NTS PO), pour une valeur de 229 195e, soit 16.000e l’ ha. Il se trouve qu’ Antoine Nogier dirige Sun’R Holding… qui se trouve associée avec Nos Terroirs Solaires Patrimoine au sein de cette SCI NTS PO. Et comme bénéficiaire effectif de cette SCI l’on retrouve Antoine Nogier qui détient 92,3% des droits de vote. Qui plus est c’est aussi son président.
Je le questionne de nouveau, et il persiste dans le déni « le groupe Sun’R n’achète pas de vigne ». qu’il agrémente tout de même de quelques périphrases : « Je suis engagé dans une initiative à but social, consistant à remettre en état d’exploitation des vignes délaissées ou sans repreneur, pour y installer de jeunes agriculteurs, dans une exploitation modernisée et pérennisée. C’est dans ce cadre et avec un partenaire financier tiers que l’achat a été réalisé ». Il n’achète pas… mais achète tout de même dans une initiative à but social. Chacun appréciera le cynisme de la nuance.
Et pour se justifier d’attenter aux terres agricoles, Antoine Nogier remet en cause le rapport de l’ADEME de 2018 qui montrait l’existence de 123 GW de surfaces disponibles en toitures industrielles, lesquelles selon Antoine Nogier ne pourraient se consolider qu’au prix d’un lourd investissement :« Y a un rapport de réalité qui fait que c’est pas possible économiquement parlant ou alors il faudrait multiplier par 10 le prix de l’énergie ». Cela c’est lui qui le dit. Puis l’État ne pourrait-il pas subventionner ces travaux ? Puis qu’en est-il des toitures amiantées qui pourraient être remplacées ? « Y a beaucoup de propriétaire qui ont pas les moyens. L’État ne vas pas prendre en charge le désamiantage des toitures privées ! » assène t-il. C’est un point de vue néolibéral qui se défend.
Notons tout de même que la même région Occitanie, qui investit dans Sun’agri, met en place une aide conséquente de désamiantage pour du PV, à hauteur de 25e le m2. L’Agence nationale de l’habitat fait de même.
Nogier ne loupe pas l’ Koch.
Mais alors qu’ Antoine Nogier dénonce les méthodes de ses concurrents dans les médias nationaux : « il y a plein de cow-boys qui parcourent la pampa »38, le nom de Christophe Koch et de sa société Shandong’s Star qui a porté le projet de 80 hectares à Ortaffa, la première centrale agrivoltaïque au monde vantée par Greenpeace, me revient souvent.
Ainsi, dans le Permis de Construire déposé auprès de la mairie de Terrats, Sun’ Agri fait un joli tour de passe-passe. Dans la Notice explicative du projet Sun’ Agri fait comme s’ ils installaient un agriculteur « L’exploitant agricole NTS exploitation Solaspres » qui leur était extérieur et qui serait intéresse par l’actionnariat du projet et s’y impliquerait. Ainsi on peut lire que « l’exploitation agricole est la première intéressée au projet, elle est au cœur de la conception du projet : son itinéraire technique, ses objectifs et ses priorités son prises en compte dans la conception de la géométrie du projet. Son actionnariat dans le projet est systématiquement encouragé et facilité (…) Nos Terroirs Solaire a manifesté un vif intérêt pour la solution agrivoltaïque Sun’agri ».
On peut aussi lire qu’ «
Ce projet « terrats 2 » a été Lauréat de l’Appel d’offre Innovation 4.3 de la CRE en 2020. En 2022 Sun’ Agri a raflé 75% des appels d’offre de la CRE… Parmi les critères de sélection en 2022, examiné et noté par l’ADEME39 la pièce 5 doit présenter « un projet agricole défini en concertation entre l’agriculteur et les agronomes de Sun’ Agri.
« Le projet est porté par trois acteurs indépendants » mentionne encore Sun’ agri en désignant l’exploitant agricole Nos Terroirs Solaires Solaspres.
Il y a tromperie claire et nette quant à cette indépendance des acteurs.
Regardons-y plus avant : Nos Terroirs Solaires (NTS) -la SCI d’Antoine Nogier, a comme établissement secondaire NTS-SolAspres (pour la région des Aspres). Créé en février 2020, son siège social se situe chez Christophe Koch à Villemollaque. L’activité de NTS-Solaspres est la culture de la vigne. Ainsi Sun’ R Holding a comme activité la culture de la vigne, et pas seulement la vente ou location d’une technologie comme Nogier me l’a affirmé. L’on peut donc aussi en déduire que Christophe Koch travaille directement pour Sun’Agri et Antoine Nogier. Ce qu’il me confirmera en m’expliquant être « consultant » pour Sun’ Agri. Qui plus est NTS-Solaspres est détenue à 99% par Nos Terroirs Solaires Développement qui a pour objet « l’acquisition de domaines viticoles et agricoles, la gestion de domaines viticoles et agricoles ». Antoine Nogier en est aussi le président.
Ainsi, sans trop faire d’effort, l’on peut en déduire que Sun’R Holding achète des domaines viticoles et agricoles. L’aplomb avec lequel Nogier m’a tout d’abord affirmé ne jamais acheter de terres reste déconcertant…
Ainsi l’on comprend mieux comment Sun’Agri gère son « initiative à but social pour y installer de jeunes agriculteurs » dans son nouveau domaine de 14 hectares acheté en 2020.
Nos terroirs Solaires Solaspres appartient donc à Sun’Agri, et aucune indépendance n’existe entre l’exploitant agricole et Sun’Agri. Le dossier remis à la CRE et à la mairie de Terrats est trompeur.
Qui plus est Christophe Koch, chez qui est domicilié Nos Terroirs Solaires-Solaspres, achète aussi des terres au nom de sa société Shandong’s Stars, domiciliée au même endroit. Koch cultiverai entre 13 et 17 hectares de vignes au nom de cette société. En août 2022 il n’est pourtant pas inscrit à la MSA, et ne peut donc être considéré comme agriculteur. Ainsi comment a t-il pu obtenir ses terres alors que des jeunes agriculteurs cherchent à s’installer dans les Aspres ? L’on ne peut que se questionner sur l’avenir des terres qu’il achète avec sa société : est-ce pour les mettre à disposition de Sun’Agri ? Car Shandong’s stars a dans ses statuts depuis 2007 « le négoce de matériel à énergie renouvelable », et les a modifiés en juillet 2021 pour y ajouter « l’exploitation d’un cycle biologique d’un caractère végétal » alors même qu’il récolte ses vignes depuis 2019. Son slogan promotionnel est « South Paradox ». Plongeons-y.
Des cascades de SCI dans la sécheresse des Aspres
En janvier 2022, à Terrats un autre projet de 25 hectares mené par Shandong’s star, la boîte de Koch, a été présentée à la SAFER. La SCI Immo Gaïa achèterait les terres et Koch en serait l’exploitant agricole. Cette SCI immo Gaïa est dirigée par Jean-Marc Mateos y Jara. Qui est Jean-Marc Matéos y Jara ? En fait, s’il est seulement présenté auprès de la SAFER comme gérant de cette SCI, il est par ailleurs président de l’entreprise Mateos Electricité et dirigeant de 41 autres sociétés qui évoluent dans le secteur de l’énergie. Matéos Électricité fait partie du groupe Solvéo Energie. Le groupe développe, finance, construit et exploite des parcs photovoltaïques et éoliens. Solvéo Energie est donc naturellement associée au sein de cette SCI Immo Gaïa. Surtout que Jean-Marc Matéos y Jarra est aussi président de Solvéo Energie, de Solvéo Investissement et de Solvéo Développement… bref de Solvéo. En SAFER il n’ a jamais été évoqué que ces terres étaient convoitées par des industriels de l’énergie photovoltaïque. Une SCI au nom anodin, aidé une fois encore de « l’intermédiaire Christophe Koch » avance comme Cheval de Troie.
Agathe Triare, en charge des Enr à la Chambre d’Agriculture explique d’ailleurs à Médiapart que « Nous recevons plusieurs dizaines de dossiers par mois. Nous ne sommes pas armés pour traiter tout ça »40.
La question qui vient : est-ce Sun’Agri ou Solvéo, ou les deux qui mettront des panneaux sur ces 25 hectares ? Vu la proximité géographique avec les autres projets menés par Sun ‘R et le fait que l’exploitant potentiel soit Christophe Koch, que peut-on en déduire ? Car dans les Aspres, Sun’R et sa filiale Volterres s’occupent déjà des centrales de Llupia, de Thuir, de Tressere…
Et puis, est-ce qu’en dehors de Koch, il existe un lien entre Sun’ R Holding d’Antoine Nogier et le Groupe Solvéo qui veut racheter 25 hectares à Terrats ? Il se trouve que Solvéo est associée depuis 2021 à Volterres qui est une filiale fournisseuse d’électricité de Sun’ R Holding… D’ailleurs pour Jean-Marc MATEOS, Président de Solveo Energie : « Intervenir en complémentarité avec des fournisseurs indépendants tels que Volterres est un atout pour développer les synergies en matière de transition énergétique »41.
Des terres attribuées à Sun’ Agri au détriment d’agriculteur.
Célia Asnard s’occupe du centre équestre Le Clan d’Epona, et me dit avoir souhaité racheter les terres autour de son centre équestre, finalement attribuées à Sun’ Agri. Une autre histoire me parvient, et elle vaut son pesant d’or en terme de « paradoxe du sud ». Il se trouve que La Safer octroie des terres à Sun’R et ce au dépend d’un jeune agriculteur. Ainsi sur la commune de Fourques en 2021, une candidature d’un Jeune Agriculteur, théoriquement prioritaire, existait auprès de la SAFER sur 9 hectares, comprenant les parcelles 597-616-618-619. Une première promesse de vente fut faite à 4300e l’hectare entre les propriétaires et un premier agriculteur. Ce dernier se désiste et un autre jeune agriculteur candidate officiellement pour 4300e l’ hectare. Mais c’est à Nos Terroirs Solaires de Koch travaillant pour Nogier que la SAFER attribue les terres. Ce jeune agriculteur s’est vu conseillé de négocier avec Koch qui n’a rien voulu savoir. Suite à quoi une autre candidature de cet agriculteur est déposée pour 7 autres hectares voisins sur les parcelles B 383-384, et reçoit le même refus de la SAFER.
Précisons encore. Il se trouve qu’une année après cette histoire d’évincement d’un jeune agriculteur, en juin 2022, la SAFER attribue une nouvelle fois à la SCI Nos Terroirs Solaires PO de Nogier les 14,5 hectares achetés dans « une initiative à caractère social » mentionnés dans l’échange avec Nogier, soit les parcelles 455-565-573-575-576-577-578-579-580-596-1508-1509. Toutes ces parcelles sont voisines ou contiguës de celles données à Nogier 1 an plus tôt, au dépend du jeune agriculteur évoqué, et qui n’a pu s’aligner sur les prix proposés par Nogier.
Ajoutons qu’en mai 2022, à Terrats, commune limitrophe de Fourques, Nos Terroirs Solaires Solaspres, a déposé deux permis de construire pour deux centrales agrivoltaïques sur vignes sur 3,7 et 2,5 hectares dans des terrains de 11 hectares au total. Ces parcelles sont elles aussi voisines des précédentes (quelques centaines de mètres).
Cela fait donc à minima 32 hectares que Sun’R holding rachète en quelques mois sur les communes de Fourques et de Terrats.
Plus tard un document promotionnel de Solaspres, l’établissement de Sun’ Agri, me parvient et fait état de 80 hectares rachetés dont 65 de vignobles sur les communes de Terrats, Fourques, Llupia et Maureillas, dont 20 % seraient couverts de panneaux42. La mairie de Terrats a d’abord refusé de délivrer 2 permis de construire, mais suite au recours de Sun’ Agri du 17 mars 2022, elle s’est vu contrainte de changer d’avis. Mme Carine Sales, maire, a refusé de s’exprimer et m’écrit « Je réitère mon choix de ne pas communiquer sur ce sujet, la liberté d’expression faisant partie de notre démocratie. Quant au recours gracieux dont vous souhaitez avoir connaissance, je ne souhaite pas, et encore moins sous la menace, le communiquer. La CADA, qui a déjà statué sur cette question, prendra une décision conforme à la loi. » La seule « menace » était ma précision que la CADA serait saisie…
Permis de construire pour une nouvelle installation agrivoltaïque de 3,7 ha à Terrats. Terrain acheté par Sun Agri et qui a été défriché récemment. Il n’ y aurait pas d’atteinte paysagère selon Sun’ Agri, et le préfet leur a accordé une dispense d’étude d’impact suite à l’avis de la MRAE : sympa !
Ci-dessus : vue vers Terrats. Le terrain à gauche du chemin a été acquis par Sun Agri et a été défriché récemment pour une nouvelle installation agrivoltaïque de 3,7 ha.
Terrats, parcelle acquise par Sun Agri. Vue sur Terrats.
Quant à Julien Thiery, en charge de la viticulture à la Chambre d’Agriculture des P-O, il m’explique que « de nombreux permis de construire ont été refusé. C’est comme cela que ça c’était passé à Terrats au début, mais ensuite il y a eu un recours de la société auprès de la mairie de Terrats qui finalement a délivré le permis de construire ». L’Agrivoltaïsme « éthique » n’a donc rien à envier aux méthodes des multinationales de l’énergie. Antoine Nogier, dans son art éculé de l’euphémisme, m’explique ainsi la chose : « La mairie ne s’oppose pas. Il y a eu des questionnements au début. Sur Terrats il y a pas de sujet, elle est plutôt pour la mairie. L’agrivoltaïsme c’est assez peu connu donc cela suscite beaucoup d’interrogation, et cela nécessite beaucoup de pédagogie ». Puis de préciser « Sun’Agri a sollicité un recours gracieux (et non contentieux), apportant des éléments complémentaires d’explication du projet, qui ont de toute évidence convaincu la mairie puisque celle-ci a accordé l’autorisation sollicitée. »
Un recours gracieux est la première étape nécessaire à un recours contentieux devant le tribunal administratif, ce que toutes les mairies savent. C’est donc une mise en demeure qu’a reçu cette mairie de la part du pédagogue Nogier.
En fait, c’est à l’unanimité que le Conseil Municipal de Terrats a délibéré contre. C’est Denis Ferrer, le second adjoint qui me l’apprend. C’est suite au Recours Gracieux de Sun’ Agri qu’ils ont été obligés de changer d’avis sous peine de la menace de payer des indemnités à Sun’ Agri, leur PLU ne leur permettant pas, à priori de s’opposer. Cet élu de cette petite commune de 750 habitants-qui ne disposent pas de service juridique, m’explique aussi que La Chambre d’Agriculture était contre les 2 projets, tout comme La CDPENAF qui a aussi exprimé son désaccord le 17 décembre 2021.
Pourtant la Directrice de Sun’ Agri ose mettre en avant « un agrivoltaïsme exigeant, harmonieux »43. Quant au pédagogue Nogier il fanfaronne : « Notre modèle est vertueux »44. On comprend mieux de quels atours se drapent cette vertu.
Revenons à Denis Ferrer, l’élu de Terrats, qui précise quant aux projets de Sun’ Agri : « c’est très simple, je suis pour les Enr et le photovoltaïque, mais à condition que cela soit réfléchit par toutes les parties, ce qui n’est pas le cas actuellement. On nous a présenté le dossier à la Cave coopérative, à la mairie, mais il n’ y a pas eu de concertation pour savoir… on nous l’a présenté comme accomplit. On a refusé une première fois et quand le dossier est revenu, on avait pas les arguments juridiques pour le contrer.
-Quelles étaient les raisons que vous aviez mis en avant pour refuser ce projet ?
-L’environnement tout simplement. C’était en bordure d’un chemin de randonnée, c’était avec une vue imprenable sur le Canigou. (On avait voté) à l’unanimité contre le projet. Tout le monde a émis en premier lieu un avis défavorable, et quand il y a eu le recours tout le monde nous a dit, si cela se passe mal, vous vous débrouillez vous-même. La Chambre d’Agriculture, la DDTM. Quand ils sont revenus une seconde fois, tout le monde a botté en touche. Bien sûr qu’il y a eu de l’opposition. Mais maintenant, rien n’est prévu juridiquement pour que les mairies puissent contrer ces projets là.
-Est-ce que vous, vous avez entendu parler du groupe Total Energie derrière Sun’Agri ?
-Mais bien sûr. On sait au final qui présente cela. Cela beau s’appeler de différentes façons. C’est pas la première fois que cela arrive dans le département. Déjà au niveau de la Chambre d’Agriculture ils le savaient. Il y’ avait une opposition des syndicats agricoles, mais vis à vis d’un emplacement ».
La MRAE, l’autorité environnementale, après analyse du dossier écrit par l’architecte maison de Sun’ Agri et de l’étude réalisée par le cabinet d’étude naturaliste Artifex, a conclu à la dispense d’étude d’impact, ce qui fut avalisé par le préfet. Pourtant, les premières observations expliquent que les rapaces ne chassent plus sur la zone des panneaux et que « la proportion d’espèces (de plantes) héliophiles et thermophiles a progressivement diminué » à cause des conditions ombragées.
Des banalités telles « la faune terrestre (insectes, reptiles, mammifères) fréquente les vignes sous structures agrivoltaïque » sont aussi mises en avant dans ce permis de construire.
Un second bureau d’étude, Altifaune basé à Montpellier, explique que « d’anciens zonages PNA Pie grièche à tête rousse et Pie grièche méridionale recoupaient la zone du projet mais n’ont pas été reconduits »…
Revenons vers Denis Ferrer, élu à Teerats, et qui siège par ailleurs au comité technique de la SAFER, mais qui n’a pas l’air de se souvenir de ce dossier en particulier. Il m’explique que si des candidatures ont été écartées au profit de Sun’ agri, c’est sûrement car des critères de priorité ont été appliqué. Par exemple la SAFER favorise un jeune agri qui s’installe et demande la DJA par rapport à un autre jeune agri qui ne ferait que consolider son installation. Pourtant, dans le cas de Sun’ Agri, deux jeunes agriculteurs souhaitent consolider leurs installations, mais l’un était soutenu par Sun’ Agri. Est-ce cela qui a fait pencher la balance ?
Denis Ferrer ajoute « D’après ce qu’ils nous ont expliqué cela va être confié à un jeune agriculteur auquel ils vont consolider l’installation. Je connais tous les jeunes agriculteurs dans le coin, mais aucun n’a l’air concerné.
-Aviez-vous entendu parler d’autres candidatures sur ces terres là ?
-Je crois qu’il y en avait, je crois bien qu’il y en avait. On a entendu parler du projet à partir du moment où ils ont achetés les parcelles et il sont voulus venir nous présenter leur projet en mairie tout simplement. L’achat était déjà fait
-Et si d’autres projets arrivent ?
-Beh si cela arrive, on avisera, mais on fera pareil, on dira non la première fois.
-Avez vous entendu parler du projet porté par Sovéo Energie et la SCI Immo Gaïa et par Christophe Koch ?
-J’en ai entendu vaguement parlé.
-C’est toujours sur les terres de Mme Sophie Caillard
-Je vois où c’est (…) Je suis totalement convaincu de cela (qu’il y a assez de surface sur les toitures, les zones artificialisées). J’aimerais que l’on soit aidé juridiquement au niveau de notre plan local d’urbanisme pour pouvoir contrer ce genre de chose. La communauté des communes, cela n’a pas l’air de la tracasser. La concertation en amont prend du temps et le problème et ces sociétés là je pense elles ont pas de temps à perdre »
J’interroge Alain Halma, Directeur général adjoint de la Chambre, Chef du service Territoires-Eau-Environnement : « Notre doctrine… pour nous ce sont des projets de territoire, et si la commune est contre, nous on s’oppose. Car il y a des impacts qui sont quand même significatifs et il faut que la commune soit d’accord avec ce projet. Pour nous c’était un avis négatif que l’on a transmis à la société (Sun’ agri). Restera quand même un sujet, qui est le sujet du paysage, d’ailleurs c’est un point qui est dans notre doctrine et cela c’est du suggestif, chacun a son point de vue. Moi sincèrement, personnellement, on a 20 000 hectares de vignes dans le département. Si dans 10 ans les 20 000 hectares sont sous panneaux photovoltaïques partout, je suis pas certain que cela me plaise.
-Que pensez-vous de Sun’Agri qui contraint une mairie à accepter son projet ?
-Beh c’est pas forcément ce que l’on pense devoir faire. Les opérateurs peuvent dire « ce projet il est rentable, ce projet il ne l’est pas » avec un taux de rentabilité qui leur va bien, c’est avant tout des producteurs et des vendeurs d’ énergie. L’impact qui est pour moi le plus fort car il est immédiat et on aura du mal à revenir en arrière, c’est l’impact sur le marché foncier, avec des prix qui sont au dessus du prix du marché, c’est extrêmement négatif pour l’installation de jeunes agriculteurs, et que la vente se fasse ou pas. A partir du moment où vous avez quelqu’un qui fait le battage, parce que c’est comme cela que cela se passe, que ce soit Sun’ Agri ou les autres, c’est partout pareil, qui cherchent des terrains pour des locations à 2-3-4000 l’hectare, alors que la location d’une terre c’est 4 fois moins voire 5 fois moins, également des prix de vente qui sont au dessus du prix du marché, beh autour le propriétaire qui sait que cela se passe comme cela, il dit « je vends pas, j’attends qu’ils viennent me voir, voire même je vais aller bientôt les rencontrer » lorsqu’ils arrivent à la retraite ou quoique ce soit ».
Même son de cloche chez Agathe Triaire, chargée de mission énergies renouvelables à la Chambre qui me confirme le désaccord de la Chambre quant au projet de Sun’ Agri sur Terrats « Au départ quand on a rencontré Mme le maire elle était défavorable, donc nous on a suivit ça ». Je lui parle du recours gracieux de Sun’ agri contre la décision de la mairie « je vous avoue qu’on ne le savait pas du tout. Ils nous ont dit que leur acte qu’ils allaient faire ensuite dans le processus, c’était justement plutôt d’aller faire un travail avec la collectivité, d’aller sur le terrain et de montrer aux gens, d’expliquer ce qu’ils voulaient faire, etc.». Expliquer certes, mais via une mise en demeure…
L’Intermédiaire Christophe Koch choqué.
J’interroge donc Christophe Koch, l’ intermédiaire de Sun’agri, quant aux méthodes du parangon de vertu agrivoltée qu’est Sun’ Agri. Koch nie tout en bloc, mais passe de la pommade avant : « J’ai regardé un peu L’Empaillé, il y a un concept de que j’aime bien, c’est « journalisme d’investigation plutôt que de validation ». Mais il faut rester prudent, car ici on est dans une région qui est un peu particulière. Alors après lorsque l’on communique avec la presse d’investigation, c’est toujours à double tranchant, mais je veux quand même répondre à vos questions. J’ai essayé de copier leur concept (celui de la province chinoise de shandong) en disant l’énergie et l’agriculture peuvent être tout à fait complémentaires, parce que l’agriculture dispose du foncier, et a besoin d’énergie. Y’ a un article qui a été fait par Greenpeace qui était venu m’interviewer à l’époque et avait fait un article intéressant sur le projet d’ Ortaffa. On était précurseur avec cette centrale photovoltaïque qui a été faite en 2007, mise en service en 2013. On avait choisit cet endroit car c’était pas un bon endroit pour les vignes. Puis j’ai travaillé gracieusement pour Sun’ Agri durant quelques mois. Le côté ombrière photovoltaïque pilotée par intelligence artificielle, c’était assez bien, mais la structure sous les panneaux qui pouvaient être améliorée. Je suis consultant. Sun’ agri est un partenaire privilégié ».
Je l’interroge sur le jeune agriculteur : « – Alors là vous me posez une colle, car cette personne je la connais, elle ne m’en a jamais touché un mot. Ces terres, au moment de la liquidation, ont été proposée 3000e l’hectare, et nous on les a rachetées aux alentours de 10 000e l’hectare.
-J’ai des témoignages comme quoi cette personne vous a contacté à la mi-février 2021 et que vous n’avez pas forcément voulu lui laisser des parcelles, 7 hectares sur lesquels elle candidatait.
-Cela ne dépend pas de moi. Attendez que cela soit bien clair. Ceux qui achètent c’est Nos terroirs Solaires. En aucun cas je suis entré en contact avec cette personne. Elles comptait les acheter peut être à beaucoup plus faible prix.
-Pourtant sa candidature reste bien plus élevée que la première mise à prix par les liquidateurs judiciaires
-Moi quand j’ai dit à Nos Terroirs Solaires qu’il y avait des terrains qui étaient intéressant pour eux, je leur ai dit attention ce sont des lots : on achète pas que la partie agricole. Donc souvent ce qui se passe, c’est pour cela que la SAFER ne suit pas, c’est que les gens veulent la cerise qui est sur le gâteau, mais ils ne veulent pas la croûte du gâteau. Sur les 9 hectares achetés, il y a 2 hectares qui ne valent rien. Nous on a fait un prix moyen. Moi je l’apprends par vous, cela m’horripile un peu. J’ai toujours fait des projets éthiques, c’est le genre de remarques qui me chagrinent. De ce terrain elle ne m’en a jamais parlé, et la seule fois où je l’ai vu, l’affaire était déjà faite (…) C’est même beaucoup plus que 9 hectares. Un an avant, en 2020, la vente portait sur 14 hectares
-Ce seraient ces mêmes hectares sur lesquels il y a eu une candidature sur 7 hectares en 2021 ? Vous les aviez déjà achetés en 2020 ?
- Bien sûr. J’ai une attestation de notaire en juillet 2020 dans laquelle ces 7 hectares avaient déjà été achetés
Je lui donne le nom des parcelles pour vérifier.
-Ah non c’est pas celles-là.
-Donc du coup vous les connaissez ces parcelles là ?
-Bien sûr que je les connais
-Et du coup elles sont rachetés aussi par Nos Terroirs Solaires
– Oui oui tout à fait. Là cela s’est passé exactement de la même façon, le bien est passé par la SAFER aussi. Et j’ai jamais été au courant d’une candidature. Nos Terroirs Solaires aurait été avertit
-Vous avez dit être consultant pour plusieurs société, est-ce que vous avez candidaté pour une autre société sur 25 hectares à terrats en janvier 2022, avec la SCI Immo Gaïa ?
-J’ai une petite confidentialité à tenir
-Est-ce que vous pouvez me parler de la Sci Immo Gaïa ?
-Je vois pas ce dont il s’agit.
-Est-ce que vous travaillez avec le groupe Solvéo Energie ?
- (silence). Je connais le groupe Solvéo. Vous être un journaliste d’investigation je le vois bien, j’étais même pas obligé de vous répondre aujourd’hui, c’est moi qui vous ai rappelé. Là vous passez du coq à l’âne. Moi je peux vous dire une chose, je ne travaille qu’avec des sociétés qui sont éthiques.
- Alors pourquoi lors de cette candidature SAFER de janvier 2020, n’y a t’ il pas écrit Solvéo Energie, mais SCI Immo Gaïa ?
- Moi j’interviens sur l’aspect agricole, entendons-nous bien.
- Mais dans cette candidature vous êtes indiqué comme en étant candidat exploitant
- Qui est exploitant ? Me questionne t-il
- La société shandong’s star
- Monsieur… vous êtes, vous êtes… vous anticipez beaucoup
- En tout cas c’est ce qu’il y a écrit sur cette candidature SAFER
- Attendez je peux pas être exploitant puisque la Chambre d’Agri m’a dit que je ne peux pas être exploitant
- C’est comme cela que cela a été signifié auprès de la SAFER. Pourquoi Solvéo ne s’annonce pas tel quel et passe par une SCI ?
- Alors là je vais vous dire, c’est des montages. Vous prenez le groupe Sun’R, ils achètent avec une SCI. Tout le monde achète avec des SCI. On achète pas avec des structure types SARL, ou SCEA. Il y a des structures dédiées au foncier, mais là c’est fiscal, d’un point de vue fiscal on achète avec des SCI
- C’est bien pour faire un projet d’énergie renouvelable que Solvéo achète
- Beh Solvéo c’est une société d’énergie renouvelable
- Donc il y a bien un projet d’énergie PV sur ces terres aussi ?
- (silence) Mais si, si Solvéo achète ces terrains là, c’est qu’il y a un projet d’énergie renouvelable dessus. Mais actuellement, vous le dîtes cela, mais c’est même pas à l’étape d’embryon. Mais je peux pas parler à la place des gens, juridiquement je suis pas mandaté ».
Déstabilisé il en vient à me dire « je peux pas candidater sur des terrains qui ne m’appartiennent pas » alors que c’est le propre d’une candidature SAFER…. Je reprends :
- Mais comme vous êtes liés et indiqué comme exploitant de cette SCI…
- Non je suis pas l’exploitant de cette SCI Immo Gaïa, en aucun cas.
- Ou le candidat exploitant pour ces terres là
- Oui, mais alors entre les projets et les réalisations, il s’écoule beaucoup d’eau sous les ponts. Sur des projets éthiques, il y a en 1 sur 10 qui passe.
- Je reviens sur la première histoire. Si vous aviez su qu’une candidature jeune agriculteur existait sur les mêmes terres que vous, est-ce que Nos terroirs Solaires aurait racheté ?
- Cela ne me regarde pas, c’est le travail de la SAFER
- Combien d’hectares ont été rachetés par Nos Terroirs Solaires sur les communes de Fourques et de Terrats ?
- Actuellement une trentaine. C’est pas parce que vous êtes jeune agriculteur que vous êtes prioritaire. Quand on a achetés avec Nos Terroirs Solaires, on était aussi exploitant nous. Donc il n’ y a pas de priorité de quoique ce soit, il y a une priorité de logique et d’exploitation. Ils ont crée une SCEA lorsqu’ils ont achetés les premiers terrains, et ils exploitent les vignes avec la SCEA Nos Terroirs Solaires.
- Nos Terroirs Solaires Solaspres ?
- Tout à fait. C’est pas Solaspres qui a acheté, c’est une SCEA. C’est la SCI Nos Terroirs Solaires qui a acheté et qui a donné en fermage à Solaspres. Moi je suis consultant viticole de Solaspres. Ces 30 hectares vont être replantés de vignes, et cela sera plus abouti que ce qui s’est passé à Tresserre.
- Est-ce qu’avec une trentaine d’hectare de panneaux sur ces 2 communes là des Aspres, alors que la Cave du Terrassou met en avant une région aux paysages bruts et préservés, ne va t’il pas y avoir une atteinte à ce terroirs, à ces vignes ?
- Je vous rassure de ce côté là. Tous nos projets, il y a des études paysagères
- Avec des panneaux qui sont beaucoup plus haut, ils seront forcément visibles.
- Ça c’est pas mon métier, c’est le bureau d’études environnementales
- Mais vous quel est votre avis dessus ?
- Mon avis dessus, c’est qu’à un moment donné… tous les projets que j’ai fait il faut vraiment arriver dessus pour les voir, et je vous parle de centrale d’ Ortaffa. Je pense qu’aujourd’hui avec le changement climatique, si on agit pas très vite, on va perdre nos Appellations et ce qui caractérise nos régions. Quand on parle d’esthétique, je l’entends, et je suis le premier à y faire très attention.
- Est-ce que le rôle que vous donnez aux panneaux, ne peut être rempli par des abricotiers par exemple ?
- Non. Depuis que la PAC existe, on peut pas faire des cultures mixtes, sinon on perd l’Appellation. C’est à dire planter comme cela se faisait avant. Moi je serai pour, faire comme les anciens faisaient avant, c’est à dire tous les 50 arbres ils avaient un pêcher, un abricotier et cela donnait une certaine fraîcheur à la vigne. Et ils plantaient sur la même parcelle des grenache, des carignans et des cinsaults. Parce que quand le grenache qui est un cépage précoce était touché par le gel, le carignan qui est un tardif rattrapait la chose. C’est à cause de la PAC qui oblige à faire de la monoculture
- Mais du coup, est ce que vous ne pensez pas que les panneaux ne sont pas forcément à la bonne place et qu’il faudrait favoriser une véritable agroforesterie, une diversification des parcelles en termes de cépages et d’arbres fruitiers ?
- Mais bien sûr, mais bien sûr. Mais cela va prendre… vous savez quand vous avez habitué les gens à la facilité de cultiver que de la vigne, c’est beaucoup plus facile que de cultiver 3 variétés de vignes et deux d’arbres. Aujourd’hui les gens se sont habitués à désherber, à labourer, se sont habitués à la facilité, avec la grande aide des laboratoires phytopharmaceutiques. Et donc là maintenant vous allez leur dire « vous pourrez replanter certains arbres », déjà, il faut rebattre complètement les cartes au niveau de l’INAO.
- Vous dîtes qu’il faut changer les choses, mais à partir où il y a des panneaux, cela change les choses dans une seule direction et pas dans le sens d’une diversification des parcelles, de l’agroforesterie
- Moi ce que je veux, toujours en étant pragmatique, c’est sauver ma vigne et faire la même qualité de raisin que je faisais avant.
- Et cela peut toujours se faire si des personnes quittent les AOC et diversifient leurs vignes en replantant des cépages différents…
- Moi je le fais chez moi ça, mais je peux pas faire que cela.
- Mais pourquoi ne pas faire chez les autres ce que vous faite chez vous ?
- Parce que chez moi je peux décider, je suis décideur. J’ai sacrifié 1 hectare que j’avais pour faire un cépage Sicilien. Mais je peux pas faire cet essai, parce que l’on est tenu tout de même, sauf à perdre tous les avantages de la PAC, des plans de replantations parce que sinon il faudrait être multimillionnaire pour replanter une vigne sans aucune aide de la PAC. On est tenu, on est tenu !
- Du coup il y a cette pente qui a été prise de poser des panneaux, plutôt que d’essayer de faire évoluer le vignoble vers d’autres pratiques
- J’ai planté ce cépage sicilien, mais je perd l’appellation. Je suis obligé de le faire en vin de France et de faire toute la commercialisation
- Est-ce que vous ne pensez pas que la présence de panneaux ne va vous faire perdre l’AOC ?
- Mais si elle nous fait perdre l’AOC, mais que l’on peut quand même cultiver de la Syrah, des grenaches et des carignans, c’est cela qui a fait notre richesse dans la région.
- Oui mais là on en revient au point de départ. Vous perdez l’AOC, donc quitte à perdre l’AOC, autant mettre des arbres et des abricotiers, non ?
- Non mais enfin là c’est pas moi qui décide.
- Mais vous travaillez avec ces sociétés-là.
- (silence) non mais moi je conseille, ils veulent replanter de la vigne, je leur dis replantez ça. Là vous entamez un sujet qui va arriver qui doit arriver mais qui va mettre 50 ans à arriver. Il y a différentes façon d’y arriver, mais les panneaux en sont une. Ils faut pas mettre les gens dos à dos, il faut d’avantage essayer de les mettre ensemble pour obtenir un but commun, ici c’est sauver nos vignobles. Et la première des choses pour sauver nos vignobles, c’est intéresser nos jeunes agriculteurs à venir sur nos terrains, et là actuellement cela n’en prend pas le chemin » … termine celui qui a contribué à en écarter..
« J’aurai aimé éviter ce rachat par Sun’agri »
Pierre Pagnon, actuellement dans la commission énergie renouvelable de la Chambre d’Agriculture, et vice-président des JA, ancien président des Jeunes Agriculteurs des PO en exercice à ce moment, me confirme cette histoire d’un jeune agriculteur qui s’est vu concurrencé par Antoine Nogier et Nos Terroirs Solaires. Pierre Pagnon précise : « En temps qu’ex-président JA, je trouve cette situation regrettable et j’aurai aimé éviter ce rachat par sun’agri. Le problème dans ce cas comme très souvent c’est qu’un investisseur fait monter les enchères sur la fourchette haute de la moyenne observée dans le secteur. Ce genre de projet, on a beau les refuser, il y en a de plus en plus. ».
Mais comment la SAFER a t’ elle quand même pu attribuer des terres à Antoine Nogier ? Pierre Pagnon m’éclaire « Quand on a un jeune agriculteur qui propose 1 euros le m2 et quand un investisseur propose 2,50e le m2 et qui en plus ne fait pas de chichi pour acheter une terre qui est à côté, alors que le jeune agriculteur va être en difficulté financière pour aller racheter des lots complets, la SAFER, elle va favoriser le plus offrant. Il y a une autre astuce, c’est la révision de prix. Si on estime que le prix est au dessus de sa valeur on demande une révision, sauf qu’il y a des ventes qui sont déjà passées et qui font jurisprudence et qui ont déjà fait monter le prix du foncier dans les Aspres, où on parlait de 4000e l’hectare, 40 centimes le m2, et maintenant avec les projets financiers photovoltaïques on se rapproche des 1 euros le m2 ». Soit 10 000e l’hectare. « C’est au delà de ce que peut mettre un jeune agriculteur compte tenus des faibles rendements agronomique de ces coins là », continue Pierre. « C’est une distorsion de concurrence, mine de rien, qui est claire. J’ai vu des situations où la concurrence entre le jeune agriculteurs et l’entreprise était perdue parce que le jeune agriculteur n’avait pas les reins assez solides pour investir. D’ailleurs je crois même que c’était ce cas-là, parce que c’était dans les 6 ou 7 hectares, il y a 3 ans à peu près »
Cela me rappelle le prix des terres rachetées par Antoine Nogier (229 195e pour 14,5 hectares soit 16.000e l’hectare) évoquées lors de notre entretien. Nogier me justifiait ainsi cet achat de vignes à Fourques : « Le prix moyen de la SAFER que vous évoquez datent de 3 ans (2019), ils sont aujourd’hui à la hausse » Ah ces prix qui augmentent tout seuls… Nogier précise : « (ces prix) n’incluent jamais les frais SAFER, frais que vous incluez dans le prix de vente calculé. Le prix corrigé de cette erreur se situe bien dans la fourchette des statistiques de prix SAFER, il est conforme aux pratiques actuelles en vignes plantées, et prend en compte la qualité et le potentiel agricole de cette vigne, d’un seul tenant, parfaitement entretenue et très bien exposée. La transaction a été menée sous l’égide de la SAFER dont le rôle est de veiller au maintien en activité agricole et à un prix bas et cohérent des terres agricoles. Je vous invite du reste à les contacter ».
Pierre Pagnon précise : « Avec la chambre d’agriculture nous avons définit une charte sur les projets photovoltaïques. Ce qui en est ressorti c’est de n’accepter que les dossiers où l’agriculteur est partie prenante de retombées financières. Le photovoltaïque au sol en zone naturelle c’est non, et en zone agricole c’est non sauf s’il n’ y a aucune possibilité d’y faire pousser autre chose comme entre une autoroute et une voie ferrée ». Mais Nogier ne va t-il pas installer des fermiers qui seront extérieurs aux retombées financières ? Et puis en 2019 Nos Terroirs Solaires a racheté sur Terrats plusieurs lots en zone naturelle, selon Koch.
Je lui parle des projets de Nogier sur les 14,5 hectares à Fourques et des 2 permis de construire pour des centrales agrivoltaïques sur 6 hectares à Terrats, le tout sur terres agricoles avec potentiellement des baux fermiers en dessous : « moi a priori, je suis pas favorable. (Les baux ruraux avec des fermiers) cela ne marche. Il y a déjà eux ce genre d’expérimentation dans les PO, où on laisse les mains libres à ce genre d’entreprise photovoltaïque, elles nous promettent derrière un agriculteur parfait pour investir les serres photovoltaïques, et au final cela devient une friche absolument immonde sans personne dessous. Cela existe sur la commune de Torreilles. » Il m’évoque un projet menée par Total qui a finit par abandonner car il était dans le paysage d’un domaine viticole et amoindrissait sa visibilité. Un exemple à méditer pour Sun’ Agri et l’AOC côte du Roussillon-Les Aspres ? Néanmoins d’une façon paradoxale, il m’explique son intérêt pour le projet de Nidolères sur vignes mené par Nogier, une expérimentation suivie par la Chambre. Et bien qu’ « il ne faut pas les laisser venir, sinon il n ‘ y aura que cela. Les friches agricoles c’est souvent sur ses zones là que les projets photovoltaïques naissent, mais ce n’est pas parce que ce sont des friches que ce ne sont pas des terres à potentiel agricole, cela reste des terres agricoles et donc les projets photovoltaïque je ne suis pas favorable, mais je dois avouer que l’installation à Nidolaire elle est séduisante car elle a un potentiel agronomique ». Nogier, le prestidigitateur des Aspres.
Domaine de Nidolaire à Tessère exploité par Sun’agri. En dessous des cultures de vignes avec du Chardonnay. « C’est pas moche » explique Nogier
Champs agrivoltaïque n.1 du Domaine de Nidolaire à Tressère. En dessous des panneaux, la lumière peut se faire rare.
En arrière-plan le Mont Canigou.
J’interroge Benoît Bousquet, qui représente les JA à la SAFER, sur le métier d’agriculteur se trouvant confronté aux panneaux « Je penses que cela dénature un peu le métier, niveau paysage, niveau tout. Je préférerai voir des paysages bien verts de vignes que des paysages noirs avec des panneaux solaires dessus ». Quant au coût de l’investissement de 800 000 euros par hectare de projet comme ceux de Sun’ Agri, Benoit Bousquet « c’est pas que je suis pas favorable du tout aux investisseurs, mais quant c’est à soi, on le gère peut être autrement, et 800 000euros, par les temps qui court, c’est un peu choquant. Certains projets qui étaient portés, c’est des gars qui mettaient les panneaux qui achetaient les terres et après ils mettaient des agriculteurs à s’en occuper, tout ça. Le problème c’est que si du jour au lendemain cela ne marche pas, les terres sont plus à nous. En gros on est plus chez nous. On travaille la vigne, même si la vigne est à nous, la terre n’est pas à nous. J’avais des clients «- oui on va acheter des vignes » «- Non non non non, on n’achète pas des vignes. Si tu veux acheter des vignes, tu achètes des vignes, je te les travaille si tu veux »… Mais, c’est mon point de vue en tant qu’exploitant, je travaille des vignes qui sont à moi. Cela me plaît pas trop que quelqu’un soit avec moi et que je doive rendre, entre guillemets, des comptes à quelqu’un. Le problème derrière (la raison de ces projets) c’est toutes les charges que l’on a et les prix de vente qui n’augmentent pas. A l’heure d’aujourd’hui quelqu’un qui est en coopérative ou en cave particulière, on peut pas se permettre d’acheter 30 ou 40 hectares d’un coup comme cela, on peut pas rivaliser. C’est des gens qui arrivent avec des comptes 100 ou 200 fois plus pleins que nous, ils arrivent là, en gros pour imager avec des valises pleines, beh nous on arrive avec une petite sacoche ». Il conclut « je penses que cela dénaturera un peu quand même. Au lieu d’avoir du vert, y’ aura du noir, on verra d’abord les panneaux photovoltaïques ».
Simon Molinier est animateur de Terre de Liens dans les PO. Il me confirme le diagnostic « on est fréquemment confronté à des acteurs de ce type là. D’un côté tu as des agriculteurs qui ont pas de repreneurs et qui espèrent vendre leur terre à l’urbanisme ou d’une autre façon pour se faire le plus d’argent possible, et ils sont prospectés par ce genre d’entreprise qui vont arriver avec des prix déconnectés et ils font signer des accords assez forts aux propriétaires, ils verrouillent les terres avec des promesses de baux emphytéotiques, ce qui fait que certains propriétaires qu’ont a rencontrés voulaient sortir de ce projet d’énergie parce qu’ils n’arrivaient pas, et ils étaient pieds et poings liés. Dans les Aspres ont étudie un projet, et là on a été 2-3 fois à rencontrer des propriétaires qui attendent toujours la proposition de telle ou telle société parce qu’ils ont été contactés par un commercial et tant qu’ils ont cet espoir ils vont rien faire du côté agricole ».
Convergence d’intérêts à la SAFER des PO
Mais qui sont les membres de la SAFER des PO qui octroient des terres à Nogier ? A y regarder de plus près l’on constate qu’une convergence d’intérêts en faveur des industriels de l’agrivoltaïsme existe au sein de cet organisme dont il est souvent dénoncé l’opacité.
Attardons-nous sur la SAFER et son comité technique, qui est au cœur de cette histoire. La SAFER explique que « Le comité technique examine les dossiers des candidats à l’achat d’une terre ou d’une exploitation. Tous les projets sont étudiés. Le comité émet un avis sur celui qui s’inscrit le mieux dans le tissu local et dans les missions des Safer ». Divers membres sont présents « chambres d’agriculture, banques et assurances mutuelles agricoles, syndicats agricoles représentatifs, des collectivités territoriales : conseil général et associations de maires, de l’État : le directeur départemental de l’agriculture et le directeur des Finances publiques ».
Denis Basserie est président du comité technique de la SAFER des Pyrénées-Orientales depuis avril 2019. Mais il est aussi un administrateur de la Fédération des Pyrénées-Orientales de Groupama depuis 2019. Depuis le 27 janvier 2020, il est au CA de la caisse régionale Groupama Méditerranée. Sa photo est même mise en avant en une du site de Groupama Méditerranée. En tant que président du comité technique de la SAFER, il ne peut que donc être au courant de cette histoire et de l’achat de dizaines d’hectares par Sun’Agri parfois au dépend de jeune agriculteur, ou de la candidature de Solvéo Energie sur 25 hectares déposé à la SAFER. Pourtant, lors d’un court entretien avec lui il nie tout en bloc :
« Vous faites fausse route, c’est complètement erroné. Les agriculteurs sont toujours privilégiés. Y a forcément un couac quelque part.
- Justement il y a eu un couac, j’ai les preuves et je souhaitais avoir le sentiment de la safer
- Ah non il y a rien d’avéré. Il est complètement faux que les jeunes soient mis de côté. Je penses que la personne qui vous a raconté cela elle affabule complètement. Les gens ils disent juste ce qu’ils ont envie de vous dire. Ils disent pas la totalité des choses. Donc dès qu’ils sont lésés, donc forcément. Il y a pas de couac.
- La SCI Immo Gaïa qui est en train de racheter 25 hectares, c’est une entreprise des énergies renouvelables et dépend de Solvéo Energie
- Je suis pas au courant là dessus
- C’est un dossier qui a été soumis à la SAFER
- Bon beh je sais pas, voyez avec mon directeur. Moi je passes 800 dossiers par an, j’ai pas en tête tout ce qui se passe ».
Comment expliquer qu’ autant d’hectares partent aussi rapidement dans les mêmes communes vers les mêmes entreprises, via le même intermédiaire Christophe Koch, et que la SAFER laisse faire ?
Des hypothèses apparaissent.
En mai 2021 Sun ‘R Holding a fait entrer dans son capital le Crédit Agricole via sa filiale SOFILARO. Cette dernière est la filiale spécialisée en capital investissement des Caisses Régionales de Crédit Agricole du Languedoc et de Sud Méditerranée. Sofilaro détenait fin 2021 70 participations dans des start-up et PME d’Hérault, Gard, Lozère, Aude, Pyrénées-Orientales et Ariège et 60% des actifs sont dans l’environnement et la transition énergétique.
Un communiqué du Crédit Agricole de septembre 2019 complète le tableau naissant d’un potentiel conflit d’intérêt: « Crédit Agricole Assurances (et le) Groupe Groupama annoncent ce jour la signature d’un accord au terme duquel Groupama (entrera) au capital de Predica Energies Durables (PED), filiale du Crédit Agricole Assurances dédiée aux investissements dans les actifs de production d’énergies renouvelables aux côtés d’Engie, leader dans la production d’énergies solaire et éolienne en France ». Le partenariat constituerait la plus grande plateforme d’actifs renouvelables opérationnels en France.
En 2022 Sun’ R a passé un partenariat avec Engie.
Résumons :
1-Groupama rentre au capital de la filiale énergie renouvelable du Crédit Agricole (PREDICA), une filiale associée à Engie.
2-Engie est déjà associée à Sun ‘R et le Crédit Agricole est entré au capital de Sun’R via sa filiale du Languedoc-sud méditerranée, lieux de la quasi totalité des projets de Sun’Agri.
3-Le Crédit Agricole (via André Thomas) et Groupama (via Mme Dominique Durini) siègent officiellement au comité technique de la SAFER des P-O et officieusement via des paysans ayant des responsabilités dans ces banques et assurances.
4-Denis Basserie, le président du comité technique de la SAFER des Pyrénées-Orientales est au CA de la caisse régionale Groupama Méditerranée.
5-Bien d’autres membres ont des liens avec l’industrie photovoltaïque
Ainsi une année avant le problème rencontré par le jeune agriculteur, il existait potentiellement quelques personnes en faveur de l’octroi de terres à Sun’ Agri au sein de ce comité technique des Pyrénées-Orientales…
Continuons, car Basserie n’est pas seul dans son cas.
Gérard Majoral siège aussi à la SAFER. Il est président de la fédération Groupama des PO, mais aussi administrateur au journal L’Indépendant (du groupe La Dépêche). Cet ancien joueur de rugby professionnel a t-il botté en touche lors de ce dossier ?
Annie Conte, siégeant à la SAFER est présidente de la caisse locale La Canterrane sud Réart du Crédit Agricole en 2019. En 2022 Annie CONTE est administratrice de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud- Méditerranée Ariège et Pyrénées-Orientales.
André Tomas, le seul siégeant officiellement pour le Crédit Agricole, dirige le nouveau centre d’affaires des entreprises agricoles et agroalimentaires de la caisse régionale du Crédit Agricole Sud Méditerranée lancée le 20 juin à Perpignan. La démarche de la caisse régionale consiste à avoir une entrée sectorielle et à accompagner les entreprises agricoles et agroalimentaires dans leur investissement pour le développement de leurs exploitations et activités, leurs projets énergétiques… « Ce centre d’affaires va aussi favoriser les rencontres entre producteurs, transformateurs et commercialisateurs. Cela représente à ce jour 300 groupes dans les Pyrénées-Orientales et l’Ariège, et in fine plus de 800 partenaires. Il s’agit de répondre aux enjeux de souveraineté alimentaire, de circuits courts, de décarbonation, d’énergie propre… » 45
Qui plus est « André Tomas a rappelé que le Crédit Agricole a l’habitude de travailler avec la SAS 3S pour le financement des projets photovoltaïques. Ce dernier peut atteindre 100% »46
Roger Pailles, ce maire d’Espira de Conflent au 6ème mandat, est loin d’être étranger à Groupama, dont il a été un des dirigeants nationaux. En mai 2007 il démissionne du CA de Groupama Immobilier national, et fut président de Groupama sud jusqu’en 2007.
La Coordination Rurale (CR) siège à la SAFER des PO
Une CR nationale s’extasiant en 2022 devant les vignes de Sun’ agri à 800 000e l’hectare: « Le bon sens paysan est respecté »47, alors même qu’elle se dit « très attachée à la liberté des agriculteurs»48. Est-celle de se jeter dans la gueule ouverte des industriels de l’énergie ?
Sous couvert de « bon sens paysan » ce syndicat explique que « la production d’énergie (est) en lien avec l’activité agricole »49. N’est-ce pas de la « dé-coordination rurale » que de dire ceci ?
Fataliste et opportuniste, ce syndicat prône l’installation de 30 000 hectares de panneaux sur des terres agricoles : « face au manque de rémunération des produits agricoles, l’agriculture française et les agriculteurs doivent savoir saisir toutes les opportunités qui se présentent, notamment celles liées à la politique de la transition énergétique avec ses objectifs nationaux du PPE (Plan Pluriannuel de l’Énergie)(…) Pour saisir concrètement ce que représentent ces puissances supplémentaires attendues dans l’espace agricole, considérons qu’on peut installer 1MWc de photovoltaïque au sol sur 1 ha. Donc pour réaliser 30 GW de plus en 7 ans, cela représente une surface au sol de 30 000 ha environ soit 2 000 sites potentiels de production de 15 ha en France.
Pour atteindre ces objectifs, il est évident que des centrales photovoltaïques seront installées sur des terres agricoles (…) Déplorant que l’acte de production alimentaire ne soit plus reconnu à sa vraie valeur et ne permette plus aux agriculteurs de vivre normalement de leur profession, la Coordination Rurale ne s’oppose pas à ce qu’une partie de l’espace agricole soit utilisée à cette fin de production d’énergie»50.
Mais qu’en est-il de ses représentants locaux ? Dans les P-O, deux de ses membres attirent l’attention. Tout d’abord Jean-Noël PILLIEZ, représentant de la Coordination Rurale. En août 2015 il défend avec Philippe Maydat un communiqué faisant l’éloge du photovoltaïque « Le photovoltaïque, une piste évoquée par la CR66 depuis 2008. Dès 2008, la CR66 s’est positionnée en faveur du développement de l’énergie photovoltaïque comme un complément de revenu pour amortir les conséquences de la crise touchant l’agriculture catalane. En janvier 2009, la CR66 a interpellé par courrier les députés, les sénateurs, le président du Conseil général et le ministre de l’Agriculture afin de lever les blocages auxquels était confronté le développement de cette énergie dans le département. Pour étayer son propos, dans la même période, la CR66 avait rédigé un dossier afin de promouvoir le développement du photovoltaïque pour le secteur agricole et l’avait diffusé massivement ».51
Philippe MAYDAT donc, président de la Coordination rurale, semble être bien tombé dans le panneau de l’agrivoltaïsme. Il a signé un bail au lieu dit Pla de l’Arque 1 avec l’entreprise d’agrivoltaïsme Tenergie à Saint Jean Pla de Corts. Ainsi qu’un second bail avec la même entreprise pour une centrale à Maureillas las Illas.
La Société Pla de L’Arque a été fondée par Tenergie et a été absorbée par Teneoc-Battle. Tenaoc Battle est la société qui a absorbé Sud Agri Roussillon détenue par Bruno Vila, le richissime chef de la FNSEA des PO, membre de la Chambre d’Agriculture sur le quel nous reviendrons. Tenaoc-Battle a pour objet « l’édification et l’exploitation de tout équipement productif d’énergie photovoltaïque. Elle exerce l’activité de holding ». Elle est dirigée par Tenergie et Nicolas Jeuffrain, le vieil acolyte de Bruno Vila depuis 2013 et la société Agri Solar City.
Au point que dès 2016 l’ Assemblée Générale de la Coordination Rurale du département… se déroule sous les serres photovoltaïques de Philippe Maydat : « La réunion s’est poursuivie par la visite des serres photovoltaïques installées récemment sur l’exploitation de Philippe Maydat. L’investissement total pour les serres photovoltaïques est de 5 millions d’euros, dont 3 millions d’euros uniquement pour les serres. En tant que tel, cet investissement est donc inenvisageable pour un agriculteur. L’entreprise de photovoltaïque installe par conséquent les serres et en garde la propriété pendant 30 ans. Elle perçoit également l’argent généré par la production d’électricité. Il s’agit d’une opération blanche pour l’agriculteur qui dispose des serres pour la mise en place de ses cultures. La réunion s’est terminée autour d’une paella conviviale. »52
paella conviviale de Philippe Maydat, patron de la Coordination Rurale des PO, sous les serres de Tenergie
Dans les autres membres de la SAFER, nous avons Philippe Maler, au CA de la SCA Plaine du Roussillon jusqu’en 2019. Une SCA qui est associée depuis 2015 avec la Société Plaine Energie qui fait de la « Production et vente d’énergie sous toutes ses formes, et notamment la production, la vente d’électricité, de chauffage et gaz carbonique dans le cadre d’une activité de cogénération »
Mais aussi Gilles Tibié, directeur de la Fédération Départementale de Chasse du 66, et aussi associé gérant de la SCI l’éolienne.
La Chambre d’Agri en pleine grippe agrivoltée
Une Chambre d’Agri qui est dominée par la FNSEA. Une Chambre qui est représentée à la SAFER. Une FNSEA des P-O dont le président, Bruno Vila, est lié aux industriels de l’énergie.
Revenons en 2008 lorsque la Chambre était très critique des projets PV sur terres agricoles, au point qu’un « Halte au pillage » a été lancé par Michel Guallar, le président de la chambre d’agriculture « auquel n’ont pas résisté les investisseurs opportunistes qui se bousculaient au moment de la bulle solaire aux portes des mairies »53
Puis en 2013 La Chambre se positionnait contre le projet PV d’Ortaffa mené par Koch sur des terres agricoles, même s’il s’accompagnait de pâturages de brebis, et d’apiculture : « Les promoteurs n’ont toutefois pas complètement vaincu les réticences de la chambre d’agriculture. « L’idée de relocaliser la vigne sur des terroirs de qualité avec des cépages adaptés est intéressante, admet Jean-François Jacquet, directeur adjoint de la chambre. Mais nous préférons privilégier les installations photovoltaïques en toiture ou sur des espaces déjà artificialisés. Nous faisons le pari que l’agriculture dans ce département rebondira un jour et qu’il faut donc protéger son territoire.»54.
Puis Fabienne Bonet devient présidente de la Chambre. En 2020 elle soutient l’opposition à un projet photovoltaïque qui se mobilise pour sauvegarder les paysages et l’attractivité touristiques des domaines viticoles « Prise de court par l’avancement de ce projet qui lui a été notifié par les dirigeants du domaine Rière-Cadène, la Chambre d’agriculture des P.-O, par la voix de sa présidente, Fabienne Bonet, fait savoir qu’elle soutient l’opposition et les arguments de la famille Rière-Cadène qui dénonce le caractère préjudiciable pour l’exploitation de cette centrale solaire accolée au mas et terres viticoles du domaine. Toutefois, favorable à l’utilisation de terrains non agricoles pour l’implantation de projets de ce type, la proximité du domaine viticole déroge à cette règle »55.
Qui plus est « le président de l’organisme de défense et de gestion de l’AOP Rivesaltes, Francis Capdellayre, soutient le combat du domaine Rière-Cadène. « Avec ce projet, c’est toute une profession, tout un territoire qui est dénigré. Ce manque de considération m’affecte profondément » confie-t-il.56
L’on pourrait en déduire que la Chambre s’oppose ainsi aux projets photovoltaïque de Sun’agri ?
Alors qu’en 2021-22 Sun’ Agri passe en force à coup de recours gracieux pour imposer ses projets, la Chambre d’Agriculture explique depuis juillet 2021 « tous les projets photovoltaïques doivent être des projets de territoire. Il est inenvisageable qu’une installation prenne place sur une commune sans que la collectivité et les citoyens en soit informés et aient exprimé leur accord ».57
Malgré cela, la Chambre est tombée dans le panneau de l’agrivoltaïsme, qu’elle cherche à distinguer du PV sur terre agricole, alors qu’il a les mêmes conséquences d’atteinte aux paysages et que cela n’en reste pas moins des projets industriels. Ainsi la Chambre accompagne le projet de Sun’ Agri sur vignes à Nidolère.
Julien Thiery de Chambre d’Agriculture m’explique quant à ce projet suivi par la Chambre « il est encore trop tôt pour avoir un avis ferme et définitif sur est-ce que c’est agronomiquement compatible ou pas. Je mettrai pas ni ma carrière ni ma vie en jeu pour défendre farouchement l’agrivoltaïsme ».
L’agrivoltaïsme, juste une question de sémantique
Agathe Triaire, chargée de mission énergie renouvelables à la Chambre, m’explique le cheminement administratif des porteurs de projets. Car certains permis d’agrivoltaïsme sont instruits par les services départementaux de la DDTM, et d’autres comme celui de Sun ‘Agri à Terrats, directement par la mairie, bien moins armées : « pour l’instant, les permis agrivoltaïques c’est des permis qui sont considérés pour des outils agricoles, comme un bâtiment agricole, comme un domicile d’exploitation qui serait sur terre agricole, et donc c’est instruit par les mairies. Effectivement contrairement aux centrales au sol qui sont vues comme quelque chose qui est d’utilité publique et qui sont directement transmises à la préfecture. Donc c’est la mairie qui instruit cela, ou si la mairie a donné compétence à la communauté de commune, c’est la communauté de commune, ou la commune peut aussi transférer la compétence à la DDTM.
-Mais comment on différencie un projet dit « agrivoltaïque » d’un projet photovoltaïque sur terres agricoles ?
- C’est là la difficulté et effectivement c’est ambiguë, parce que c’est finalement juste une question de sémantique et la procédure elle est quand même plus simple d’aller, de passer en mairie que à la DDTM. Mais… c’est… au bon dire de la personne, du pétitionnaire, parce qu’il suffit qu’il écrive… je sais pas comment se fait le tri, si y ‘a écrit agrivoltaïque et que la personne se proclame faisant des projets agrivoltaïques, finalement cela suffit. Et puis c’est vraiment spécifique aux départements. Je crois que c’est dans l’Aude, où tous les permis sont des permis d’État
- La spécificité des PO, c’est que la DDTM n’a pas forcément pris la compétence auprès des Com Com ?
- C’est ça, oui (dans les PO) il y a une différence. Il y a quelques communes qui sont encore sous RNU effectivement.
« C’est une vague »
Champs photovoltaïque à Banjuls-dels-Aspres. En arrière-plan le Mont Canigou.
Agathe Triaire précise « bien en amont (Sun’ agri) achète tous les alentours pour être certain de bien sécuriser le projet, ce que font toutes les sociétés. Nous on avait reçu trois projets (de sun’ agri) sur ces communes (Terrats et Fourques) de trois hectares environ.
– Bien que sun’agri ait acheté à minima une trentaine d’hectares sur cette zone. Est-ce que cela correspond à la Charte de la Chambre d’Agri qu’autant d’hectares soient rachetés ?
– Non bien sûr, mais là on touche à une limite du système. On a pas un œil là dessus, c’est impossible, et tous le font. C’est sûr que c’est pas du tout la bonne solution.
C’est impossible d’avoir une vue sur le nombre de projets dans le département. Même la DDTM n’arrive pas à en avoir une, c’est une vague, c’est impossible de savoir. Même les projets déjà construits personne ne sait combien il y en a, les données sont souvent confidentielles, c’est des données privées. C’est extrêmement dur d’avoir une synthèse de cela, c’est malheureux, c’est terrible de même pas avoir la vision de cela, la vérité c’est que personne ne le sait.
(Quant au foncier) il n’ y a pas de solutions évidentes. Forcément le rachat des terres par les porteurs de projets implique qu’il y a du foncier bloqué, du foncier qui est plus cher. Mais en même temps, si dans un premier temps la CRE a ouvert des appels d’offres, a initié des tarifs de rachat sur terres agricoles, c’est aussi cela qui a commencé, qui a fait marcher ce problème. Parce que si avant il y avait aucun tarif sur terres agricoles, cela limitait vachement, l’enjeu n’existait pas. Si demain les lois sont assouplies en faveur de l’ agrivoltaïsme, on pourra rien faire non plus.
– Que pensez-vous de projets qui coûtent 800 000e de matériel par hectare, un modèle très technologique, basé sur algorithmes ?
- y a plein de questions sous-jacentes. Est-ce que l’on a envie de produire de l’énergie sur terres agricoles ? est-ce qu’il y a besoin d’aller sur les terres agricoles pour produire de l’énergie ? Est-ce que c’est une opportunité pour l’agriculture ? Non je pense pas. Cela dépend comment c’est fait. Ce qui est sûr c’est que c’est pas ça qui va redynamiser le secteur agricole et qui va augmenter les productions agricoles, ça c’est sûr. Toutes les sociétés se tournent vers les terres agricoles, on est bien obligés de rentrer dans ce jeu là, en tout cas de donner notre avis.
- Pourquoi ces sociétés vont sur les terres agricoles au lieu des toitures industrielles ?
- parce que c’est beaucoup moins cher. Parce qu’une terre agricole, c’est grand, c’est plat, c’est une carte blanche pour faire ce qu’ils veulent, c’est sûr que c’est beaucoup moins cher. C’est que récemment, nous c’était une volonté de nos élu.es de regarder les projets alors qu’avant (la chambre des PO) c’était un non généralisé. C’est vrai qu’il y a eu une grosse pression sur le nombre de dossier, de sollicitations et même au niveau politique d’aller sur les terres agricoles. C’est ce qui a fait que l’on a sorti une Charte qui était un peu différente qu analyse les dossiers au lieu de tous les rejeter.
- Est-ce que l’évolution de la Chambre quant à cette question est liée à Bruno Vila, actuel président de la FNSEA des PO, élu à la Chambre et qui est extrêmement lié à l’énergie photovoltaïque, que ce soit lui ou son père Francis, est-ce que cette évolution de la Chambre n’accompagne pas son évolution personnelle ?
- M Vila est au bureau de la Chambre, mais les activités de son père ne sont pas du tout au cœur de la Charte. Mais oui c’est vrai que son père a beaucoup de sociétés photovoltaïques et Bruno a différentes installations, parce qu’il a des serres notamment assez technologiques ».
Une pression foncière accrue
Alain Halma, Directeur général adjoint de la Chambre, Chef du service Territoires-Eau-Environnement précise « sur la région des Aspres, la pression foncière est accrue par les énergies renouvelables, et cela contribue en particulier sur les Aspres à une augmentation des prix. On a des opérateurs qui achètent au delà du prix agricole, et autour, à partir du moment où il y a eu des achats, il y a des propriétaires qui disent « moi je vais pas vendre à l’agriculteur qui me le demande parce qu’untel va me proposer 10% de plus que le prix ». Donc on a un blocage foncier et cela c’est un inconvénient qui est avéré, et pour lequel nous voyons des conséquences négatives pour des gens qui veulent s’installer, pour des gens qui veulent restructurer leurs exploitations, il y a un blocage très très important. Et je dirai que c’est même pas une histoire de prix, c’est le fait que derrière l’opérateur photovoltaïque il paie plus vite, etc… Dans le secteur du Creste au nord de Perpignan où c’est pas irrigable, les prix sont moins chers normalement que sur les zones irrigables, donc forcément les agriculteurs sont surpris lorsqu’il y a un surenchérissement du prix parce qu’il y a un opérateur photovoltaïque qui traîne là. Donc vous savez comment ils fonctionnent les opérateurs photovoltaïque ? Ils mandatent des intermédiaires fonciers qui vont faire le tour d’un secteur qui commence à être un peu paralysé à cause de cela. Agathe a été sollicité par 20-30-40 opérateurs en 18 mois. Et puis le propriétaire foncier on lui propose une location pendant 20 ou 30 ans à 2000 euros par hectare (et par an), il peut attendre dans un contexte de pression et de prospection d’un opérateur. Imaginez ça, un ancien agriculteur, il a 10 hectares, cela fait lui 20 000 euros, c’est 4 fois sa retraite : qu’est-ce que vous voulez qu’il dise ?
(…) Y a beaucoup de parcelles à vendre, mais il y a un manque de bras. (…) A la SAFER, lorsqu’il y a concurrence, la commission priorise les agriculteurs. S’il y a concurrence c’est au même prix de rétrocession de la SAFER et la priorité va aux agriculteurs et il y a des critères : le bio est prioritaire, l’installation est prioritaire. Celui qui est parachuté de n’importe où et qui est en concurrence avec quelqu’un qui est sur le secteur, cela va pas le faire.(…) Généralement lorsque c’est une SCI qui achète des terres agricoles, c’est niet au niveau des commission Safer, il faut que cela soit une exploitation agricole ».
Pourtant, c’est bien la SCI Nos Terroirs Solaires de Sun’ Agri qui a racheté les terres à Terrats et Fourques, de l’aveu même de Christophe Koch.
Mais alors, pour quelles raisons la Chambre accepte t’ elle l’agrivoltaïsme ? Si là aussi, je découvre que certain de ses membres sont liés à cette industrie, il semble que c’est aussi pour se démarquer d’un photovoltaïque trop tapageur et indécent, que ce soit-disant vertueux agrivoltaïsme est mis en avant58.
Si Jean-Pierre Bails est le 1er secrétaire général de la Chambre, il est par ailleurs administrateur de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Sud- Méditerranée. Ce qui questionne de nouveau sur le rôle du Crédit Agricole qui s’est lié et finance Sun’ Agri.
Mathieu Maury est secrétaire adjoint à la Chambre Agri. Il dirigea aussi jusqu’en 2017 l’entreprise La Garbelouse à Mantet qui « a pour but en France et à l’étranger la mise en valeur et exploitation des énergies renouvelables, gestion et secrétariat »
Bruno Vila, l’homme aux 50 sociétés
Mais le plus intéressant, est Bruno Vila, secrétaire adjoint à la Chambre et aussi président de la FDSEA des Pyrénées-Orientales. Médiapart nous apprend qu’ à cause de lui une polémique a eu lieu dans l’interprofession des fruits et légumes, l’Interfel, car « Le poste de corapporteur du comité bio d’Interfel est attribué à Bruno Vila, dirigeant d’une importante coopérative du sud de la France, Rougeline, qui développe massivement des cultures de tomates sous serres, hors sol – en s’appuyant sur un modèle de serre hollandais, qui coûte entre 700 000 et 1,4 million d’euros à l’hectare. Vila est l’alter ego du breton Kerangueven dans le Sud. Forte de 340 hectares de cultures de tomates, fraises et concombres sous serres – et 700 hectares en terre –, et de 230 producteurs, Rougeline fait un chiffre d’affaires de 123 millions d’euros. L’élection de Vila, vécue comme une « provocation » par le camp du bio, entraîne la sortie de la Confédération paysanne du comité bio. Interfel a refusé de répondre aux questions de Mediapart sur cette crise interne et Bruno Vila n’a pas donné suite à nos demandes »59
Bruno Vila est aussi le fils de Francis Vila, le roi de la tomate sous serres photovoltaïque, épinglé par Libération et… la Chambre d’Agriculture des PO. Voici comment il est défendu par le lobby du secteur « Aujourd’hui, Francis Vila possède près de 50 MW (40 ha) en serres dans le Roussillon qui alimentent l’équivalent de 15 000 foyers chaque année. Francis Vila ne nie pas cependant qu’il existe une problématique, soulevée par Libération, de conflit d’usage entre agriculture et photovoltaïque. De nombreux promoteurs ou développeurs opportunistes se sont engouffrés dans ce créneau des serres photovoltaïques sans forcément réfléchir à leur vocation agricole et sans partenaire agriculteur. Il est vrai que certaines serres solaires des Pyrénées-Orientales demeurent vierges de toute culture et peuvent poser question. Pas celles de Francis Vila, l’Agriculteur ! »60
Plongeons dans la trépidante vie d’entrepreneur de Bruno Vila, qui en plus de son mandat syndicat, dirige une cinquantaine de sociétés.
Il est ainsi gérant de la société AQUITAINE GEOGAZ. Mais aussi de Solar Agri City, fondé en 2011. En 2013 il associe Tenergie Développement au sein de Solar Agri. Tenergie est en 2018 le deuxième producteur d’électricité solaire en France derrière Engie avec 303 Mwc de capacités installées, que ce soit au sol ou sur des serres.
Vive les randonnées avec Tenergie !
Projet de tenergie: vive les randonnées !
Le dirigeant de Tenergie, Nicolas Jeuffrain, devient aussi dirigeant de Solar Agri City.
En 2017 la famille Vila disparaît des statuts après une cession des parts à Legum City- mais que dirige toujours Bruno Vila. Le siège social est directement chez Tenergie.
En 2019 Horta de la Mar rentre au capital de Solar Agri City à la place de Tenergie. Horta de la Mar a une claire activité agrivoltaïque : « Acquisition d’éléments d’exploitation agricoles, prendre, donner à bail tous biens ruraux notamment pour l’exploitation d’installations de production d’électricité ». Tenez-vous bien, c’est Bruno Vila qui en est aussi le dirigeant. Solar Agri est donc détenue par 2 sociétés : légum city et Horta de la mar, toutes deux dirigées par Bruno Vila qui se dore sous le photovoltaïque.
Mais Bruno Vila fait mieux encore.
Il détient aussi La société Agrisolar Salanque qui a pour objet social « l’activité photovoltaïque ». Cette société est détenue par la Société Bruno et Franck (son frère) qui a pour premier objet une activité de Holding de sociétés de filiales. En 2000 est fondé la SAS BRUNO. Elle s’occupe d’entreposage, de logistique, locations de locaux, prestations informatiques. Bruno Vila en est gérant. Rapidement dans les années 2000 l’objet de cette SAS change et en 2010 « l’exploitation d’installation de production d’électricité et de chaleur utilisant des énergies renouvelables, de vente d’énergies renouvelables » sont ces activités exclusives. Il est présent dans les statuts jusqu’en 2013.
Saint Laurent Solar est aussi une société qui a été dirigée par Bruno Vila. Aujourd’hui il est toujours au capital. En 2008 il apparaît comme le dirigeant de SOMAL, une société maraîchère. Le 1er avril 2008 Bruno Vila en devient dirigeant et ouvre le capital à l’ EURL Somal Energie. En 2008, l’objet social concerne toujours uniquement l’agriculture. C’est en 2011 que l’objet social concerne «l’exploitation d’installation de production d’électricité utilisant l’énergie renouvelable » et leur vente. C’est à ce moment que Valéry Goy, président de la Coopérative Sud Roussillon, et associé actuel de Bruno Vila dans la Coopérative Rougeline, ainsi que Valeco Solar, industriel du renouvelable, entre au capital. Bruno Vila démissionne (mais reste au capital) et laisse la place à Eric Gay, propriétaire du groupe Valeco, un des plus grand acteur du renouvelable en Europe et surtout du photovoltaïque, basé à Montpellier. Eric Gay est actuellement assigné en justice pour pratiques illégales de fourniture d’énergie… C’est en 2013 que cette charmante société prend le nom de Saint Laurent Solar et a pour objet « la construction et l’exploitation d’installation de production d’électricité utilisant des énergie renouvelable ». En 2019, c’est Valeco elle-même qui dirige la société.
Il dirige aussi via la société Bruno et Franck « VERTISOLAR » qui a pour objet « Activités photovoltaïques et toutes activités s’y rattachant », société qui doit bien rapporter puisqu’il rachète avec elle un château à 500 000 euros.
Autre société, mêmes méthodes. Sud Roussillon Agri Solar est une société fondée en 2011 par Bruno Vila et Valéry Goy. En 2013 Tenergie entre au capital. Même schéma que pour Agri Solar City, en 2016, c’est l’Horta de la Mar, appartenant à Bruno Vila qui prend la place de la famille Vila et de Valéry Goy.
En 2019 une fusion se fait avec la société Tenaoc-Battle qui absorbe Sud Roussilon Agri solar (qui vaut tout de même 7 millions d’euros). Dans ce traité d’absorption d’avril 2019, qui est une réorganisation interne à Tenergie, Bruno Vila dispose toujours d’un bail et d’un droit sur la centrale photovoltaïque du lieu dit- Villerase à Saint Cyprien 66751 depuis le 10 juin 2016.
Tenaoc-Battle a pour objet « l’édification et l’exploitation de tout équipement productif d’énergie photovoltaïque. Elle exerce l’activité de holding ». Elle est dirigée par Tenergie et Nicolas Jeuffrain, le vieil acolyte de Bruno Vila depuis 2013 et la société Agri Solar City.
Tenaoc-Battle exploitait en 2019 2 centrales photovoltaïques dans les P-O : à Camélas (lieu-dit Sarrat d’en padern) et Saint Féliu d’Amont.
Tiens donc ! Battle… ne serait-ce pas le Pierre Batlle chez qui vient d’être inauguré la centrale de Sun’agri sur poirier à Llupia dans les P-O en septembre 2022 ? Existe t’ il un lien entre Pierre Batlle et Tenaoc-Battle (dirigée par Tenergie) ? Une subtile différence de lettre dans le nom de famille me met un doute.
Vérifions : en 2015, il se trouve que Pierre Batlle a déjà monté une serre photovoltaïque de 2,5 hectares avec Tenergie, commune de Camélas, au lieu-dit Sarrat d’en padern, dixit « la demande d’examen à l’étude d’impact ». Étonnamment, il se trouve que c’est le lieu-dit même (Sarrat d’en padern) où la société Tenaoc-Batlle exploitait en 2019 une centrale photovoltaïque (selon les documents de l’absorption de sud agri roussilon par Tenaoc-batlle). C’est l’ EARL La Comtesse qui portait ce projet de serres. Cette dernière est dirigée par les frères Pierre et Julien Batlle, tous deux propriétaires de la société Ille Rousillon. Cette dernière société nous ramène vers Sun’ Agri.
L’Usine Nouvelle nous dit que l’ arboriculteur Pierre Battle dirige la coopérative Ille Roussillon et porte le projet de sun’Agri sur poires qui vient d’être inauguré en septembre 2022 : « À Llupia, au sud-ouest de Perpignan (Pyrénées-Orientales), un projet pilote d’ agrivoltaïsme dynamique développé par Sun’Agri (groupe Sun’R) est inauguré le 15 septembre dans un verger de poiriers, une première pour Sun’Agri qui a déjà des démonstrateurs dans les vignes et des vergers de fruits à pépin ou à noyau. La centrale, installée sur un terrain de plus de 2 hectares nouvellement planté par l’arboriculteur Pierre Battle de la coopérative Ille Roussillon, a une puissance de 1,77 mégawatts crête pour une production annuelle attendue de 3 000 MWh »61
Ultime vérification : à Camélas encore, toujours au lieu-dit Sarrat d’en Padern, la société Tenaoc-Battle (Tenergie) est domiciliée62. On y trouve aussi la société Ille Roussillon dirigée par Julien Battle et son frère Pierre, ainsi que les établissements Tenao 55 (un établissement de Tenergie) et Tengo (un autre établissement Tenergie).
Bref Pierre Batlle (ou Battle) est bien lié à Tenergie, société dans laquelle Bruno Vila, le richissime président de la FNSEA, a des intérêts. Battle est aussi au bureau de FDSEA 66, syndicat dirigé par Vila.
Résumons : on a Bruno Vila qui s’associe à Ternegie dès 2013. Tenergie fait une restructuration interne et nomme l’absorption de Sud Agri Roussillon « Teneac-Battle ».
Vila et Batlle sont donc liés via des intérêts commun avec Tenergie.
Et Pierre Batlle fait ensuite un projet avec Sun’agri : reste à savoir si Tenergie et donc Vila, président de la FNSEA y ont participé.
Puis Sun’Agri, via sa filiale Volterres vient de se lier à Tenergie « Dans une perspective de plus long terme, Volterres a noué un deuxième partenariat avec un autre producteur indépendant Ténergie »63
Francis Vila, de la tomate à la vigne photovoltée.
Mais s’il n’a pas de responsabilité, Francis Vila, le père de Bruno, reste un témoin intéressant de cette ruée vers l’or photovoltaïque.
Francis Vila dirige en avril 2021 la Société « Les vignes d’Ortaffa » dont l’activité principale… est «l ‘ activité photovoltaïque, l’exploitation d’installations de production d’électricité et de chaleur utilisant des énergies renouvelables, de vente d’électricité d’origine renouvelable » au Lieu-dit El Tec Vell Route de Saint Cyprien 66200 CORNEILLA-DELVERCOL.
Continuons avec ce vigneron photovolté :
« Les vignes de Nidolères », au lieu-dit El Tec Vell 66200 Corneilla-del-Vercol ont le même objet et furent créées à la même date. Tout comme « Les vignes de Trouillas ». Même objet, même lieu, même date 2021. Idem pour «Les Champs de Taxo», même lieu, même date, même objet, tout comme pour « Les vignes de Casenove », « les vignes de saint andré », « les champs de nidolères » la « solaire Elisa ».
Ah nuance : « La Société Lysisol », a une activité de holding. Le directeur suppléant était Christophe Courtois en juillet 2019, décédé à 48 ans. Il était le directeur général du bureau d’étude Tecsol, un lobby du photovoltaïque. Courtois était depuis 2018 « membre éminent de la communauté solaire française. Toujours à la pointe de l’innovation, il avait également pris, en 2016, les rênes de la start-up Sunchain, spin off de Tecsol dédiée à la blockchain solaire. Il était ainsi très actif au sein de la French Tech à Perpignan »64 Par ailleurs, André Joffre le dirigeant de Tecsol est au CA d’Enerplan avec Antoine Nogier de Sun’ Agri et Jeuffrain de Tenergie…
« Installer des panneaux sur la vigne c’est un champs photovoltaïque déguisé »
Loïc Pujol, fils de l’ancien maire de Fourques. Vigneron en agriculture biologique dans ses vignes à Fourques dans Les Aspres. Famille de vignerons depuis 8 générations. Vignes de grenache en gobelets avec vue sur le Mont Canigou.
Cette évolution de la Chambre est dénoncée par Jean-Luc Pujol, ancien vice-président de la Chambre d’agriculture et membre du bureau (2015), et maire de Fourques durant 2 mandats « comme la Chambre d’agriculture avait pris une position très claire en disant avis défavorable sur tout ce qui est terres agricoles. Évidemment il y a eu une levée de boucliers de beaucoup de maires, parce que l’on nous disait « avec l’agriculture, avec les problèmes que vous avez, bientôt il n’ y en aura plus, vous empêchez les gens de faire des projets, nous les communes on en a besoin, etc.. ». Ensuite il y a 4 ans à peu près, la position de la Chambre a un petit peu évoluée sous l’impulsion de ce que l’on a appelé les serres photovoltaïques ou bien les vignes sous panneaux photovoltaïques, en disant on veut bien essayer de réaliser des expérimentations. Parce qu’il y avait des failles dans la réglementation. Notamment Mr Vila il avait monté plusieurs projets, soi-disant serres photovoltaïques et en fait il y avait rien qui poussait, c’était simplement des champs photovoltaïques légèrement surélevé. On s’est aperçu aussi que c’était pas simple de définir si un agriculteur souhaite développer un projet parce que le statut d’agriculteur il peut être éphémère, et qu’est-ce que c’est qu’un agriculteur, c’est quelqu’un qui est inscrit au registre de la Mutualité Sociale Agricole et il suffit d’avoir un bout de terre et de s’y inscrire pour se dire agriculteur et monter un projet. Et puis de fil en aiguille et sous la pression des pouvoirs publics et maires concernés, l’avis de la chambre s’est de plus en plus assoupli, jusqu’aujourd’hui où pour la plupart des projets il y a un avis favorable. Installer des panneaux sur la vigne c’est un champ photovoltaïque déguisé, car même la vigne on a beau dire effectivement que cela empêche le rayonnement solaire et baisse le degré, c’est pas du tout pratique d’aller travailler la vigne sous des panneaux et la vigne est souvent un alibi. Il y a de moins en moins de maires qui sont agriculteurs et donc ils connaissent pas bien ce qu’est l’espace agricole et donc pour eux un parc photovoltaïque c’est comme un lotissement.
– quels étaient les élu.es qui poussaient en ce sens ?
– Par exemple Brice Cassagnes qui est par exemple président de la coopérative de Rivesaltes était favorable à ces projets. Bruno Vila bien sûr aussi. Fabienne Bonnet elle même la présidente.
- Comment expliquer que la safer octroie des terres à sun’agri ?
- Il y a pas tant de publicité que ça qui est faîtes et la safer s’est toujours débrouillée pour faire a peu près ce qu’elle voulait. Si la SAFER avait voulu vraiment redistribuer ces terres à des agriculteurs, elle aurait fait une réunion à la mairie de Terrats en invitant l’ensemble des agriculteurs et en disant voilà y a 80 hectares de terres qui se libèrent. Je vais vous citer un exemple : il y a quelques années il y avait des gens du voyage qui achetaient des terrains agricoles et puis on a vu s’installer des ferrailleurs etc en plein milieu des terres agricoles. C’est extrêmement compliqué quand le circuit a commencé de faire revenir ses terres dans le giron agricole. La Safer avait eu vent sur Fourques d’une demande sur 4 hectares et il craignaient fort que cela soit quelque chose comme cela. Puis finalement j’ai réuni 6 jeunes agriculteurs et on se les ai partagé. Donc la Safer quand ils veulent ils peuvent faire. »
Des terroirs connectés plus vrais que nature !
L’avenir de la vigne selon Sun’agri. Pyrénées-Orientales.
Célia s’occupe d’un centre équestre sur la commune de Terrats, le clan d’ Epona. Voisine des parcelles où Sun’Agri a déposé 2 permis de construire, elle m’explique que c’est un endroit très sauvage, aucun fil électrique ne vient gâcher la vue sur le Canigou.
Mais Sun’agri « a tout rasé. Ils ont enlevé les vieilles vignes, ils ont arraché des arbres, alors les écolos j’aimerai bien les voir. Il y avait des chênes de 3-4 mètres qui poussaient en bord d’un terrain, ils ont tout arraché. Je voulais les récupérer car cela me faisait mal au cœur, mais le lendemain tout était broyé, j’en ai eu les larmes aux yeux. C’étaient des chênes qui commençaient à être jolis, ils ont tout détruit en s’en foutant complètement. Il y avait tout un écosystème là dedans. Tout s’est fait caché, personne n’était au courant. Sur Terrats ils auraient acheté 70 hectares. Avec le centre équestre, je vais me retrouver à faire des ballades à cheval dans le photovoltaïque. Moi je m’étais mise là car il y a pas de fils électriques, y a pas une baraque, y a rien. On m’a fait galérer pour les permis de construire pour des abris pour chevaux et je n’ai pas obtenu l’autorisation. Et les mecs ils arrivent là et ils vont faire des hectares et des hectares de panneaux photovoltaïques qui vont gâcher complètement les Aspres. On a une vue magnifique et y a rien qui gâche au milieu et a priori cela ne dérange pas la mairie, c’est un peu rageant. Cela détruit tout le paysage que j’essaye de vendre avec mes ballades nature au cœur des Aspres. Les premiers permis de construire, on pense avec les vignerons de la cave du Terrassou que c’est un test pour voir si on réagit ou pas. Ils risquent de perdre l’appellation Aspres à cause des panneaux juste à côté. Le mec qui met du photovoltaïque il s’en fout du terroir et des vignes. Les vignerons sont contre, que ce soit pour la beauté du paysage qu’ils vont perdre ou pour la qualité du raisin qui va pousser dessous. En plus moi les terres j’avais été intéressée, sauf que les gens ils veulent vendre ça à des prix exorbitants donc il y a que des mecs comme eux qui peuvent acheter et pas nous avec nos petits moyens, pour acheter la terre au prix de base ».
Terrain défriché pour une nouvelle implantation agrivoltaïque. Commune de Terrats : Célia du Clan d’Epona fait voir le terrain qui a été acquis par Sun Agri et qui a été défriché récemment.
Pire encore, elle qui n’a même pas l’électricité dans son centre équestre et son habitation, et alors même que son activité fait vivre le tourisme et la vie locale, Sun’ Agri affirme dans son permis de construire que les pratiques touristiques autour du site présentent peu d’enjeux, en mentionnant spécifiquement l’activité de Célia Asnard.
Aussi, Sun’ Agri va devoir amener sur 2 km les lignes électriques, et n’a pas pris la peine de prévenir les propriétaires qu’il allait passer dans leurs terrains.
Promenade en cheval aux alentours de Terrats. Le Clan d’Epona. A droite le champ pour lequel un permis de construire déposé par Sun’ Agri a été accepté.
Revenons vers Antoine Nogier qui m’assène par surprise « Je prétend que nous on essaye de
maintenir les terroirs tels quels ». Il continue : « On va continuer de faire de la vigne, la même vigne qu’avant, de planter les mêmes cépages et d’éviter de devoir changer de cépages parce que le climat sera trop rude.
- Est-ce que la présence de panneaux ne change par le rapport à l’agriculture, à la terre, au cadre de vie ?
- Non je pense pas, je penses que si vous en mettez partout bien sûr, mais il s’agit pas d’en mettre partout. Je pense que considérer de façon arbitraire et de façon presque idéologique que le fait de mettre des persiennes change le terroir, encore une fois non, pas forcément, vous me permettez d’avoir un point de vue différent ».
Bien entendu que cela soit permis au président du lobby France Agrivoltaïsme, mais ne peut-il pas le garder pour lui et ne pas se servir des difficultés du monde agricole et du changement climatique pour l’imposer à une petite commune ?
Un Nogier qui continue de claironner « Il va falloir mobiliser des terres agricoles pour la transition énergétique. Il y a un besoin de 100 à 150 000 hectares. Les 100 GW de Macron c’est bien, c’est rond, il a le mérite d’avoir avancé un chiffre que personne avant lui n’avait osé avancer. Nos projets, c’est entre 3 et 5 hectares.
- Mais si les projets de 5 hectares sont multipliés, est-ce que vous avez une limite par département ?
- Cela sera quelques fractions, 150 000 hectares cela représente 0,5 % des terres agricoles ». Ou le département de l’ Essonne, au choix.
Dans les échos, Nogier détaille la technologisation de l’agriculture qu’il promeut : « le dispositif d’orientation des panneaux donne toujours la priorité aux besoins en lumière de la culture. Ce qui suppose que l’algorithme qui le gère à distance depuis le siège lyonnais de l’entreprise maîtrise parfaitement le comportement de la plante. Et soit en mesure de réagir aux données de température et d’humidité, tant au niveau de la feuille que du sol, que lui remontent les capteurs installés sur le site. Des paramètres qui changent d’une culture à l’autre »65.
Des terroirs « tels quels » par Sun’ Agri à Llupia. Au dessus des pauvres poiriers, une culture de kilowatts.
Le coût de cette merveille est de 800 000 euros par hectare66. Quelle belle « solution » accessible pour les paysans… De quoi les rendre encore plus dépendants à l’agro-industrie. Mais il est vrai que les arbres ont une tendance à se reproduire gratuitement tout seul et ne produisent pas d’électricité -eux.
Ainsi l’agrivoltaïsme n’a t’ il pas le même rôle fallacieux pour les paysan.es que les objets connectés donnés aux personnes âgées en l’absence d’ humains ? Cette technologisation de l’agriculture ne vient-elle pas pallier l’absence de prix rémunérateurs, le gigantisme des surfaces qui deviennent impossible à gérer sans de puissantes machines alors même que les paysan.es se retrouvent seul.es dans leur ferme ? Ne vient-elle pas pallier la destruction des arbres et des haies lors de décennies de remembrements industriels des parcelles ?
« – Non je ne suis pas de ceux qui pensent que les systèmes connectés, la technologie sont l’ennemi de l’agriculture, au contraire ils peuvent aider l’agriculteur à dormir correctement sur ses deux oreilles, à avoir moins de stress et à faire un métier qui est extrêmement difficile. Ce sont des agriculteurs qui se sont réappropriés leur agriculture, leur métier et la technologie les aide. Avec l’ agrivoltaïsme on peut redonner vie au sol qui revient au centre des préoccupations des agriculteurs.
- Mais préoccupation qui revient via une technologie qui elle n’est pas du vivant. Et c’est peut être ce rapport là qui questionne beaucoup. Vous dîtes que les agriculteurs se réapproprient le vivant mais via une technologie qui elle ne l’est pas.
- Il y a autant de systèmes agricoles que d’agriculteurs. Tout le monde a le droit de faire des choix différents.
- Est-ce que l’agrivoltaïsme ne maintient pas les agriculteurs dans des modèles qu’on leur a imposés et qui étaient une impasse ?
- L’agrivoltaïsme c’est pas la seule solution
- Vous, quel type de paysage vous préférez ?
- Mais s’il y’ en avait partout, cela me choquerait. Quand vous êtes dessous, il y a une structure, je ne trouve pas cela moche, ensuite s’il y en avait dans tous les champs à perte de vue, c’est comme les éoliennes, je trouverais cela moche bien sûr. Je dirais « non mais cela suffit, j’en ai ras-le-bol ».
Mais là est la différence, dans le rapport sensible au monde que l’on peut entretenir. Et puis c’est son lobbyisme avec France Agrivoltaïsme, auprès des parlementaires qui lui permet d’obtenir une loi Enr sur mesure, un rapport de l’ADEME coécrit par son camarade Christian Dupraz, et un gouvernement qui promeut exactement le même nombre d’hectares couverts que lui…
Antoine Nogier continue de me surprendre dans son « jusqu’au boutisme » et son chantage à « l’agrivoltaïsme vertueux » permettant d’éviter pire que lui.
« Acceptez qu’il y aura 150 000 hectares de couverts avec des panneaux. Soit on le fait au bénéfice de l’agriculture, soit vous allez subir des projets de 500 hectares. C’est ce que je m’évertue à dire dans la tournée des CDPENAF avec France Agrivoltaïsme « les gars si vous bloquez tout, sachez que Macron il a décidé d’ouvrir. Si vous bloquez tout, ceux qui vont gagner c’est les grands lobbies avec des giga projets qui vont remplacer l’agriculture ». Dire « non non non non » c’est servir les grands lobbies, vous allez faire le nid de ces gens-là. Y a rien de pire que les positions « jusqu’au boutiste ». Si vous faites des trucs à charge sur l’agrivoltaïsme vous servez que ces gens là. Faîtes attention à ce que vous écrivez. Il y a plusieurs modèle en agriculture, il faut les maintenir tous. A vouloir en prôner qu’un seul on permet aux autres qui ne sont pas durables de gagner ».
L’inversion accusatoire est bien maîtrisée. D’ailleurs, en parlant de ce qu’il y a de pire : n’ y a t’ il pas les « petits » lobbies agrivoltaïques qui servent de caution raisonnable et éthique et qui tentent d’empêcher la condamnation de cette supercherie promue via ce terme marketing ? Qui empêchent ainsi une remise en cause du modèle agro-industriel qui pousse à ce genre de projet en tentant de diluer la critique que l’on peut lui adresser ? Antoine Nogier croit-il vraiment qu’un gouvernement va légiférer pour n’autoriser que les projets similaires au sien, par ailleurs déjà condamnables ? Car il n’en reste pas moins que l’équivalent de l’Essonne veut être recouvert de panneaux métalliques par Antoine Nogier, qui n’a pas l’air d’en avoir sous ses yeux, ni de travailler dans les champs.
Sinon ne se dirait-il pas « non mais cela suffit, j’en ai ras-le-bol » ?
L’AOC Côtes du Roussillon village les Aspres en péril ?
La Cave du Terrassou présente ainsi ses pratiques « Nous mettons en œuvre une culture raisonnée en favorisant les méthodes culturales « douces » (pâturage naturel, lutte par confusion sexuelle, entretien des haies,etc…) ». Des hectares de métal à 4 mètres du sol, « c’est doux » nous dirait peut être Antoine Nogier ?
Commune de Terrats, vue vers Fourques et la chaîne des Albères. Dans le dos, la parcelle achetée par Sun’ Agri.
J’interroge donc le directeur de cette cave, M Cherel qui botte en touche sur toutes mes questions : «- la cave n’achète pas les terres, et on a aucun avis particulier sur l’ agrivoltaïsme, on a pas du tout d’opinion officielle sur ce genre de sujet. On est pas concerné, moi j’ai pas d’adhérents qui sont concernés par ces sujets-là, je suis pas du tout au courant de ce qui se fait, de ce qui se fera, on est pas impliqué directement dans ces projets-là, cela ne nous regarde pas trop.
-Sont-ils venus pour échanger avec vous ?
-Pas à ma connaissance »
Mais un son de cloche quelque peu différent provient de Patrice Perez qui remet en cause la version du directeur de la Cave. Patrice Perez est administrateur de la Cave du Terrassou et fut prestataire pour Solaspres, l’établissement de Sun’ Agri domicilié chez Christophe Koch. Grâce à ce viticulteur qui s’occupait de 4 hectares rachetés par Sun’ Agri, sans que les panneaux soient encore posés, on en apprend beaucoup sur les méthodes et la vertu de Sun’Agri. S’il ne me parle pas de Sun’ Agri, il pense que Solaspres est une filiale de Total Energie, un bruit de fond qui me revient souvent.
-« Sur la commune de Terrats y a un gros projet qui se prépare avec 13 hectares. Sur Terrats et Fourques, parce que c’est limitrophe les parcelles, il y a au moins entre 30 et 40 hectares. D’après ce que je sais, il y a un voisin qui vend des terres, un agriculteur qui part à la retraite qui aurait vendu à peu près 14 hectares, là c’est en vignes, là c’est sur la communes de Fourques. Il y’ aurait entre Terrats et Fourques une cinquantaine d’hectares. Ce qui nous embête le plus avec la cave, c’est que l’on aurait bien aimé qu’ils rentrent dans la structure, et c’est pas tout à fait leur but. Les négociations sont pas finies. On les a reçu (Sun’agri). La mairie pousse en ce sens là. Après au niveau paysager, on sait très bien que cela va… c’est… faut que ça soit étudié, car vous savez ils vous disent pas grand chose. Moi j’ai travaillé en tant que prestataire, j’ai deux enfants qui vont s’installer, cela les aurait intéressé que les enfants reprennent une partie de leur exploitation. Mais bon on a rien discuté. Moi j’ai discuté avec un intermédiaire, qui est Monsieur (il cherche son nom-il s’agit de Christophe Koch). Et de là, qu’est-ce que vous voulez… ils sont arrivés à la mairie avec la ferveur de dire «c’est les enfants de Monsieur Perez qui vont reprendre cela ». A la mairie, forcément cela leur a fait plaisir, ils sont natifs du village, c’est deux gamins qui s’installent… Et bien à la cave pareil. Et à un moment donné c’est arrivé à mes oreilles et aux oreilles du Conseil de la Cave et tout le monde me disait « mais Patrice, tes enfants reprennent cette exploitation, comment cela va se passer ? » Moi non pour le moment j’ai vu personne. Alors ils ont avancé des choses pour peut être pouvoir prétendre avoir des arguments pour le permis de construire. Alors cela m’a un peu refroidi sur le coup (…) Le salaire, par rapport aux prestations, c’était correct. Cela peut aller aux alentours 3500 -4000 euros l’hectare. Nous on aurait aimé que la société donne un bail de fermage à la coopérative.
- Au sein de la cave est-ce que vous pensez qu’il peut y avoir une incidence sur l’Appellation Côtes du Roussillon Village des Aspres ?
- Oui, je pense que cela peut arriver. Alors sur l’image du terroir, oui, parce que cela fait quand même… nous sur Terrats, c’est en plein milieu de nos vignes, c’est en plein milieu de l’Aspres cette structure, alors bon…
- Est-ce que cela pourrait vous faire perdre l’Appellation?
- Je sais pas… mais enfin… je pense pas que l’on en arrive là
- Et si vois la perdez ?
- Ah beh là on sera très mal parce que vu le terroir qu’on a, et puis vu pour tout, là cela serait dramatique.
- Est-ce que c’est un risque que vous souhaitez prendre ?
- Non non non non non non…
- La cave du Terrassous, il est mis en avant sur le site internet que c’est un paysage qui est sauvage, qui est brut, qui est préservé.
- Ah oui oui oui oui ça c’est sûr que c’est brut, c’est préservé, c’est naturel quoi.
- Et est-ce que mettre des hectares de panneaux métalliques cela va pas contre ?
- Beh ça va un peu contre, mais qu’est-ce que vous voulez. Nous, favorables, on ne l’était pas. Si demain cela se fait et que cela ne dérange pas plus que l’impact naturel sur le paysage… à la rigueur on peut rien y faire, mais faut pas que cela aboutisse à des restrictions d’ appellation sur tout un secteur (…) c’est pas que l’on a changé d’avis. C’est qu’à un moment lorsque la mairie donne des permis de construire. Il sont allés voir la mairie en avançant que mes enfants seraient repreneurs potentiels de l’exploitation. Ils se servent de certains arguments
- La Cave, vous auriez été intéressé pour racheter ses terres ?
- Ces terres… oui, on aurait peut être pu les racheter. Bon après le prix où ils ont acheté. Ils sont arrivés avec les dents longues. Ils ont racheté en moyenne les terres-vignes 14 000e l’hectare et je pense que les landes cela doit être dans les 11 000. Ils ont acheté du côté de LLuppia vers La prades à 16 ou 17 000 euros
- Personne d’autre était intéressé sur ces terres ?
- Pas à ce prix là. Y a des parcelles qui pouvaient se vendre entre 10 et 12 en vignes. Y avait plusieurs personnes intéressées. Y avait l’acteur Demaison, vous savez l’acteur de cinéma, il avait un projet sur une partie de ces terres, pour y implanter une partie en vigne, une partie avec des chevaux, c’était quasiment fait, puis y a eu quelque chose avec la mairie, et puis c’est tombé à l’eau. Y’ avait des jeunes et des moins jeunes (qui étaient intéressés). Même nous la cave on en avait discuté en conseil si on pouvait pas acheter 23 ou 25 hectares, une surface d’un seul tenant, puis le redistribuer d’une manière ou d’une autre à des coopérateurs. Cela n’a pas pu se faire parce que la dame elle a pas voulu vendre. Elle devait se douter qu’il y avait cette entreprise qui allait postuler là dessus, c’est comme cela que cela s’est ficelé. (Avec la cave) on leur proposait des prix qui devaient tourner pour des terres incultes, aux alentours de 7000e, c’est déjà bien, ça vaut pas plus, c’était même surpayé par rapport à des terres comme ça ici. Quand on vous en propose le double évidemment… ils ont les bras longs, ils ont tout ce que vous voulez… Vous connaissez Christophe Koch ? C’est lui qui gère grosso modo l’affaire. Lui il est venu à la mairie, il est venu à la cave. Moi j’ai vu que lui… et le géomètre. (…) C’est nouveau et on sait pas trop où l’on va avec cela. Au niveau géographique, il y a plein de choses qui vont bouleverser… Nous mine de rien, c’est implanté dans le cœur de notre vignoble, et… voilà quoi, bon.
- Donc vous êtes un peu sceptique par rapport à ces projets ?
- Ah oui, oui oui, oui oui, parce que l’on sait qu’il faut…. alors ils nous ont refusé sur la commune des projets d’éoliennes y a quelques années, et donc là je comprend pas comment ils peuvent accepter.
- Est-ce que cela peut avoir un impact sur l’oenotourisme ?
- Ah oui parce que c’est joli, c’est en plein milieu, cela va être clôturé, cela va fermer. Ils mettent des millions à faire des pistes cyclables et après derrière…ils ont créé une piste qui part de Terrats et qui s’en va rejoindre le boulou (?) et une partie passe en plein milieu de ce projet, donc je sais pas comment ils vont faire
- Est-ce que l’on peut parler d’industrie ?
- Alors industriel, cela va être industriel. Ils se servent du support de mettre de la vigne ou ce que vous voudrez, pour pouvoir installer eux ce qui les intéresse, c’est la production d’électricité, c’est tout. Le reste, franchement. Ça je peux vous le dire parce y a Monsieur Koch l’a dit « moi les vignes..eux les vignes cela ne les intéresse pas ». Le problème il est là. Les vignes c’est pas vraiment le but principal de l’entreprise. Après on le sait qu’ils vont se servir de cela. Bon après faut bien le mettre quelque part, mais enfin nous cela nous gêne, parce que le projet il nous gêne un peu. On pourrait pas faire autrement, et il rentrerait dans la cave, cela se passerait mieux, le but principal c’est que l’ on aurait aimé que cela se casse la gueule mais bon, cela c’est autre chose »
L’INAO en plein questionnement
Gilles Flutet est responsable du service Territoires et Délimitation, de l’Institut National de l’Origine et de la qualité (INAO). Je l’interroge sur les Aspres et la vague agrivoltaïque :
- « C’est une question légitime et c’est une question que se pose l’ INAO. Sun’ agri est le développeur principal de cette notion d’ agrivoltaïsme. Ces projets posent la question de leur compatibilité avec une production de qualité et d’impact sur le paysage. Ce que nous essayons de faire au niveau du comité national de l’INAO pour l’ensemble des filières y compris viticoles, c’est d’alerter les ODG (organisme de défense et de gestion) pour qu’ils puissent se saisir du sujet et définir leurs propres règles qu’ils pourront inscrire dans leurs cahiers des charges et de pouvoir encadrer ce type de dispositif.
-Et lorsqu’une cave qui dépend d’un AOC comme dans les Aspres se définit par un paysage sauvage et préservé, est-ce compatible avec les panneaux ?
-C’est un des éléments qui ressort de la réflexion, le paysage fait partie de… l’on va dire le terroir définit un paysage, caractérise un paysage et donc nous au sein de nos missions de protection du foncier, c’est un point sur lequel on revient régulièrement, entre autre sur la constructibilité de certains projets, le développement d’éoliennes sur certains territoires, nous on fait valoir que cela a un impact sur le paysage. Le photovoltaïque et l’ agrivoltaïque font partie des questionnements qui doivent être posés. On essaie d’accélérer le mouvement dans nos réflexions pour que les ODG puissent avoir tous les outils et savoir s’ ils souhaitent le développement de ce type de pratiques avec des contraintes et un cadre au sein de leur cahier des charges, voir s’ils veulent quasiment l’interdire. On essaie d’apporter des réponses aux ODG pour qu’ils puissent se saisir par rapport à ce genre de projet qui peuvent paraître apporter des solutions intéressantes mais qui peuvent avoir un impact plus large en terme d’économie, de paysage, d’artificialisation des parcelles. Par exemple aujourd’hui la filière avicole, en label rouge volaille s’interroge et souhaite encadrer et limiter la production photovoltaïque à 10% des surfaces concernées. La filière canard foie gras du sud ouest est très sollicitée par des opérateurs pour pouvoir mettre en place de l’ agrivoltaïsme. Il y a la volonté de réfléchir sereinement et aussi de pouvoir apporter une réponse assez rapide aux professionnels qui attendent : est-ce que l’on s’engage dedans ou pas ou comment on fait pour freiner des dynamiques pas forcément voulues par les professionnels locaux. C’est vraiment un sujet brûlant et d’actualité que l’on essaye de traiter. En IGP OAP on parle de naturalité, donc est-ce que ce type de process ne met pas à mal cette naturalité. Ce que l’on va mettre en avant dans nos avis c’est que « oui ok vous êtes libres de faire ce que vous voulez sur vos parcelles, mais vos parcelles appartiennent à une Aire Appellation Contrôlée, une IGP, et si il y a un impact sur ce périmètre là on peut émettre un avis défavorable ».
Après il y a tout l’aspect réglementaire en matière d’aménagement. Un permis de construire sur un secteur AOC, l’ INAO peut avoir un avis à donner, mais pour l’instant rien ne le contraint. Le maire, ou le président de la Communauté des Communes peut solliciter l’avis de l’ INAO. Puis il y a des règles spécifiques, en fonction de la puissance du projet. Sur les surfaces de PV là on est très vigilant car il faut éviter de consommer des espaces agricoles, encore plus lorsqu’ils sont en appellation, pour produire de l’énergie. Quand c’est une centrale photovoltaïque au sol, avec un projet même lorsqu’il y a de l’agriculture avec un élevage ovin ou bovin, généralement quand c’est sur des zones d’appellation, nous on donne des avis défavorable en disant clairement qu’il faut garder ces terres pour produire de l’appellation d’origine et pas pour faire des projets qui n’ont rien à voir avec les terroirs et les enjeux de la région. Donc c’est des enjeux qui sont très fort, comme dans l’Ain pour le Comté, c’est monté très fort l’opposition au sein de la profession, sur des prairies qui avaient un réel enjeu pour l’appellation. Sur la vigne, on est en vraiment aux balbutiements des projets. Des projets agrivoltaïques, aujourd’hui on en a pas en AOC vigne. Sur l’agrivoltaïsme, les orientations que nous l’INAO discutons, cela va plus loin, c’est de dire « il faut que l’agriculteur reste maître de sa production et ne doit pas dépendre d’un producteur d’énergie renouvelable ».
-Que pensez-vous des entreprises de l’énergie qui deviennent propriétaires de terres comme Sun ‘Agri dans les Aspres ?
-L’origine de la propriété c’est un vrai sujet qui fait parti des questions que l’on se pose dans les instances. Il faut que l’agriculteur et l’exploitant reste maître chez lui, et c’est vrai que dans des contrats de location qu’il peut y avoir avec des opérateurs d’énergie renouvelable c’est un vrai sujet. Est-ce que l’exploitant est pieds et mains liés pendant 20 ans dans son contrat ?
Il conclut: « Je vous cache que j’attends avec impatience le retour de ma collègue pour savoir si elle a eu connaissance de ces projets, car c’est un sujet intéressant et c’est vrai que l’AOC Villages des Aspres c’est quand même un très beau terroir, c’est un vrai sujet. Est-ce que vous êtes convié et avez l’invitation de Sun ‘Agri à Lluppia ? »
Oui j’ai été convié par Antoine Nogier, mais j’avais mieux à faire.
L’agrivoltaïsme coupe à blanc l’agroforesterie
Un des arguments phare qu’Antoine Nogier me sort, et qui lui permet à minima de mettre un équivalent entre l’agroforesterie et les PV en un contexte de raréfaction de la ressource en eau, est que dans le cas des vignes, les arbres, tels les abricotiers, pourraient leur faire concurrence. Fabien Balaguer est directeur de l’Association Française d’Agroforesterie, il m’éclaircit sur le raisonnement du PDG de Sun’Agri :
« Ce sont des idées reçues. On essaye de nous faire croire que l’on a plus le temps de faire pousser des arbres et donc on met des panneaux parce que l’on met de l’ombre plus vite. Il y a deux visions qui s’opposent. La grosse différence entre l’arbre et le panneau, concerne l’ombre. Avec un arbre vous avez une ombre froide et humide et avec un panneau vous avez une ombre sèche et chaude, il suffit de se mettre sous un arbre et ensuite de se mettre sous un truc métallique et voir la différence. Ensuite il n’ y a qu’à regarder le pouvoir de stockage carbone d’ un panneau, le pouvoir de reconstruction des habitats et de la biodiversité, pareil sur le cycle de l’eau. En fait ce qu’il faut c’est de la photosynthèse et de la transpiration : ce qu’il manque aujourd’hui c’est des nuages si on résume. C’est cela qui laisse penser qu’avec des arbres on peut avoir plus de résultats et surtout à plus long terme. C’est cette différence de paradigme entre des gens qui ne raisonnent pas pareil. On est dans une société qui a le don de la contradiction et qui essaye de faire des panneaux dans les champs et de l’agriculture sur les toits, y a peut être un truc à remettre en ordre. Les industriels ont inventé un truc en essayant de faire passer un cheval de Troie, en essayant de faire croire que cela allait aider l’agriculteur. Je n’y crois pas une seconde du point de vue agriculture durable et du point de vue résolution des problèmes de l’agriculteur à long terme. Alors concernant la concurrence racinaire, c’est un peu une vue de l’esprit, avec notre vision de l’être humain où l’on se fait tous concurrence entre nous, on se dit quand les racines se touchent il y a un truc qui va se passer, comme si c’était de l’électricité avec un risque de court-jus. En réalité il y a des gens qui ont excavé un système racinaire de forêt, tout se touche et il y a même des soudures entre les racines entre les arbres et cela ne « disjoncte » pas. Car en fait les racines ont une fonction avant tout d’ancrage, et de nutrition et il se trouve qu’un arbre dans un sol suffisamment profond, grâce à des systèmes de mycorhizes et de vie du sol, l’arbre est capable d’aller prendre ses minéraux et l’eau parfois à plusieurs dizaines de mètres de son système racinaire. C’est cela qui se passe dans des sols fertiles. Quand on analyse les flux de matière, l’on se rend compte que même lorsque les racines se touchent il n’ y a aucun lien avec la concurrence pour les ressources. C’est surtout très fortement corrélé à la taille du réservoir. Dans un sol dégradé, évidemment, quand vous allez mettre plus de monde, la compétition va être plus forte, mais c’est pas du au fait que l’abricotier n’aime pas la vigne, d’ailleurs en terme de mychorises c’est plutôt très complémentaire les rosacés et la vigne. Par contre évidemment si vous mettez cela dans un sol viticole qui sont parmi les sols les plus dégradés, si vous le faites mal, trop vite, trop serré vous pouvez avoir une espèce de choc qui est du au sol dégradé ».
Ajoutons que Jean-Luc Tarantini, arboriculteur du projet PV de Bellegarde porté par AKUO et la MAIF, entre deux louanges pour l’agrivoltaïsme, déclare sans même y prêter attention :« En revanche, elle accumule dans ses réserves énormément d’azote. Nous pensons que le manque de luminosité lui fait craindre de ne pas exister. Elle fait du bois au lieu de faire des fruits »67
Le PV, une panacée pour l’arboriculture ? Revenons à de la véritable agroforesterie. Balaguer précise :
« C’est pour cela que l’agroforesterie ne marche que lorsque l’on fait de l’agronomie autour des arbres. C’est à dire que l’arbre c’est pas une panacée, c’est pas un truc que l’on plante et puis il va refaire le sol et le climat, c’est une plante cultivée dans un contexte où l’on va refaire du sol fertile, donc de la couverture de sol herbacé, des pratiques de régénération de l’humus, etc… Cela nous arrive assez souvent d’accompagner des agriculteurs en leur disant « reconstruisez d’abord du sol et on plantera des arbres dans quelques années, car là si vous les plantez demain, les arbres ne vont pas pousser ». Car un arbre est toujours une plante plutôt de sols fertiles. Cela c’est la dynamique forestière qui nous le dit.
-Est-ce que seuls les panneaux, dans un contexte de sols dégradés, peuvent aider l’agriculture ?
– Cela dépend si l’on démissionne de l’agronomie. Car l’on sait pertinemment que les sols cela se régénère, et plutôt plus vite que ce que l’on croit, car quand l’on a matraqué des sols pendant 50 ans et qu’en 4 ou 5 ans l’on arrive déjà à avoir des résultats, c’est que la nature nous pardonne déjà assez vite. Donc en fait 5 ans, c’est plus long que 6 mois, c’est toujours pareil, l’on est dans une société qui va vite. On est dans un pays où l’agriculture va mal et l’on a un manque d’accompagnement technique de qualité pour sortir de l’ornière. Donc du coup si l’on a un sol dégradé et que l’on considère que c’est une fatalité et que l’on ne pourra jamais revenir en arrière, et c’est comme cela que les agriculteurs raisonnent et se font prendre au piège. On leur promet 2000 euros de revenus à l’hectare et par année sur des sols où ils espèrent plus rien, bon beh ils signent… mais cela revient à faire le deuil de l’agriculture durable. C’est pas parce qu’ils auront un revenu électricité que cela ira mieux pour eux. Si on veut s’adapter au changement climatique, il va falloir faire de l’ombre, oui, mais il va falloir aussi amortir le cycle de l’eau, remettre de la biodiversité et surtout remettre le sol en activité, le carbone, l’humus c’est aussi cela qui permet d’amortir les aléas climatiques, et les panneaux, cela ne contribue pas au sujet. En fait cela dépend si l’on veut se donner un sursis de quelques années, ou si l’on veut attaquer les problèmes à la racine. Aujourd’hui toute l’arboriculture française, et la viticulture c’est pareil, est face à des défis agroécologiques de premier ordre. Cela tient tant qu’il y a de l’eau. La seule façon d’amortir le choc, mais là aussi on se donnera peut être un sursis de 30-40-50 ans, car il est certain qu’en terme de résilience, les pratiques agroécologiques de couverture du sol, d’amortissement climatique avec des arbres, de diversification en réduisant la monoculture et la densité de plantation des fruitiers : il est certain que cela apportera plus de sursis que des panneaux qui font de l’ombre chaude et sèche. L’arboriculture aujourd’hui elle est sous perfusion. Sans compter qu’avec ces panneaux qui font des ombrières, on fait les mêmes erreurs qu’avec l’urbanisation. Au début les villages étaient plutôt sur les flancs de collines et on gardait tout ce qui était plat pour faire de l’agriculture. D’ailleurs dans les Pyrénées-Orientales c’est caractéristique, en 25 ans il reste pas grand chose, les terres agricoles ont été construites. Donc c’est toujours pareil, c’est plus simple donc on fait cela comme cela. Mais les panneaux il ne faut pas les mettre sur des terres agricoles, et si elles ne sont plus fertiles, l’on a qu’à travailler pour qu’elles le redeviennent. Je n’arrive pas à comprendre ce genre de stratégie de court terme, dans 25 ans l’on dira « mince pourquoi on l’a fait ». Et c’est pas comme s’il n’ y avait aucune autre solution. Si seulement c’était vrai que ces terres elles étaient en péril et que l’on avait besoin de ces panneaux pour pérenniser les terroirs et les cépages, mais en fait c’est archi faux, il y a d’autres solutions avec un coût/ bénéfice plus efficace »
Selon le Comité Français de L’Union Internationale pour la Conservation de la Nature « les Solutions fondées sur la Nature sont les actions qui s’appuient sur les écosystèmes afin de relever les défis globaux comme la lutte contre les changements climatiques ou la gestion des risques naturels. En effet, les réponses à apporter à ces défis dépendent, d’une manière ou d’une autre, du bon fonctionnement des milieux naturels, qu’ils soient terrestres, littoraux ou marins. Ainsi, des écosystèmes sains, résilients, fonctionnels et diversifiés permettront le développement de solutions au bénéfice de nos sociétés et de la biodiversité, dans le cadre des changements globaux (…) Les Solutions fondées sur la Nature représentent une alternative économiquement viable et durable, souvent moins coûteuse à long terme que des investissements technologiques ou la construction et l’entretien d’infrastructures grises. Elles sont flexibles et adaptables et apportent de nombreux co-bénéfices (tourisme, paysage, bien-être, activités économiques durables…).»68.
Des hectares de panneaux métalliques gérés par I. A, « c’est naturel » nous dirait peut être Antoine Nogier le PDG de Sun’Agri ?
A contrario du Conseil National de Protection de la Nature (CNPN) qui dénonçant la loi dit d’accélération des Enr favorisant l’ agrivoltaïsme de l’automne 2022, confirme par ailleurs que les « solutions destinées à limiter le réchauffement climatique impliquent la sauvegarde de composants essentiels de la biodiversité et des écosystèmes qui assurent des services écosystémiques (captation de carbone, lutte contre les îlots de chaleur, régulation du cycle de l’eau…)»69.
Sans trop prendre de risque, l’on peut affirmer que les arbres le font mieux que les panneaux, et pour moins de 800 000 euros l’hectare !
Greenpeace fait la pub du « premier parc agri-solaire d’Europe »70
La centrale d’Ortaffa dans les P-O soutenue par Greenpeace
Construite et imaginée par Christophe Koch, Greenpeace soutient et met en avant en effet le premier parc « agrivoltaïque d’Europe » à Ortaffa dans les P-O et titre son reportage vidéo « Quand l’énergie solaire éclaire tout un village ».
Christophe Koch y déclare que « l’agriculteur a gardé son métier d’origine, il n’est pas devenu un vendeur de courant ». Raymond Pla, le maire ajoute que « cela a été une manne financière inespérée pour notre commune. Nous avons eu une donation d’un très grand montant, de 1,2 millions d’euros qui nous a permis d’acheter un très grand bâtiment d’une surface de 2500 m2 ».71 Mais aussi de renflouer les caisses des collectivités locales associées à hauteur de 200 000 à 250 000 euros par an. Greenpeace se vante même que « l’exploitant du parc solaire (prenne) en charge la taxe foncière et leur paie un loyer de 1950€/ha/an sur une période de 30 ans (sachant que le prix des terrains agraires peu propices à la culture oscille entre 3000 et 5000€/ha) » 72. Soit 58 500e à multiplier par le nombre d’hectare loué, sur 30 ans… au lieu d’une seule vente à 5000 euros l’hectare et bien au dessus des rémunérations agricoles et des aides PAC… Greenpeace propose d’ acheter sa paix verte à fort prix. « Juwi EnR a financé 160k€ d’opérations de replantation viticole sur 43ha de terres de meilleure qualité et 87k€ d’aides à l’investissement pour les viticulteurs (…) Une aide financière de 10k€ a été versée par juwi EnR à un jeune apiculteur pour l’achat d’abeilles locales «noires du Roussillon» et de matériel apicole. »
« Mais la future centrale ne produira pas que de l’électricité, elle contribuera également à relancer ou à améliorer une dizaine d’exploitations agricoles grâce à une série de mesures d’accompagnement (…) Le maire d’Ortaffa, Raymond Pla, ancien syndicaliste agricole, est immédiatement séduit. « (…) A condition que celui-ci accepte aussi de distraire une partie de ses bénéfices au profit des agriculteurs »73
Ces projets prospèrent aussi sur la baisse des dotations aux communes. Greenpeace y verrait même un avantage, car avec cet argent du privé « la commune d’Ortaffa a mis en place divers projets contribuant à l’attractivité de la ville et à sa vie sociale, comme la construction d’une aire de jeux pour les enfants (investissement de 300k€), la modernisation d’une partie des logements du village ou le rachat et le réaménagement d’un bâtiment transformé en salle polyvalente (investissement de 2,5M€). La construction de nouveaux ateliers municipaux est également prévue pour septembre 2015 (investissement de 700k€) ».
Le maire du village, Raymon Pla, ancien président des JA, précise : « Juwi finance à hauteur de 160 000 euros, 43 hectares de nouvelles plantations d’ici 2013, dont 60 % en AOC. Elle met également en place une aide à l’investissement dans l’achat de matériel de culture pour un montant de 87 000 euros. Voilà entre autres la réalité de ce projet. Et voila pourquoi ce projet doit servir de référence en France et dans toute l’Europe »74.
La célèbre ONG n’y trouve strictement rien à y redire. Pire elle cite ce projet comme un des principaux exemple à suivre dans son rapport « La manne inexploitée des renouvelables ». Ces « projets de demain ont été choisis en fonction de leur taille, relativement importante, de leur maturité et de leur statut avant-gardiste », précise Valentin Vermeulen, consultant en énergie chez I-care environnement 75». « Les étudiants du master Bioterre de l’Université Panthéon/Sorbonne ont même visité le site dans le cadre d’un projet universitaire »76 fanfaronne même Greenpeace, qui rassure ses adhérents avec un petit mot sur la biodiversité et les paysages : « le parc agri-solaire a été divisé en de nombreuses parcelles délimitées par des rangées de haies et de chênes centenaires »77. Ouf…
Bien souvent, c’est le prétexte de « terres pauvres » qui sert aux promoteurs pour avancer.
Ainsi à Ortaffa 36 hectares ont été arrachés : « Choisi pour sa faible valeur agronomique (…) Sur les 87 ha loués, 36 ha étaient plantés. Trois exploitants profiteront des mesures proposées pour s’agrandir. Ainsi, Philippe Henric, qui exploitait 7 ha de chardonnay classés en vin de consommation courante, va replanter 10 ha de muscat et de grenache sur des zones AOC, avec des plants fournis par Juwi EnR. Les parcelles qu’il abandonne lui rapporteront, en outre, un loyer annuel de 1 950 euros/ha. Le dispositif permettra également à quatre exploitants tentés par l’arrachage de poursuivre leur activité »78. D’autres hectares étaient en friches. Mais qu’est-ce qu’une friche agricole ? « c’ est une terre sans paysans » m’explique Justine Bianchoni, porte-parole de la Confédération Paysanne de l’Aude. Et puis allez parler de « terres pauvres » aux paysans du Larzac et à des cultivateurs de plantes médicinales.
S’ils ont convaincu Greenpeace, les industriels de l’énergie n’ont toutefois pas complètement vaincu les réticences de la chambre d’agriculture : « L’idée de relocaliser la vigne sur des terroirs de qualité avec des cépages adaptés est intéressante, admet Jean-François Jacquet, directeur adjoint de la chambre. Mais nous préférons privilégier les installations photovoltaïques en toiture ou sur des espaces déjà artificialisés. Nous faisons le pari que l’agriculture dans ce département rebondira un jour et qu’il faut donc protéger son territoire »79
Alors que Greenpeace se fait VRP de l’ agrivoltaïsme en 2015, 7 ans plus tard elle s’attire indirectement cette réponse de la Confédération Paysanne : « Quelle que soit sa surface, un parc photovoltaïque sur des terres agricoles et naturelles, est une installation de nature industrielle qui altère les paysages et l’attractivité touristique. Nous refusons l’industrialisation des campagnes (…) nous souhaitons vivre dignement de notre métier qui n’est pas de produire de l’énergie. L’unique raison de la pression industrielle actuelle sur les terres agricoles, naturelles et forestières est financière. Favoriser le PV sur ces terres est un choix politique que rien dans un budget étatique ne peut justifier. Toute l’agitation des ministères et des agences de l’État pour légitimer ces projets et « l’agrivoltaïsme », est une diversion visant à enrichir des sociétés, souvent multinationales, sur le dos du monde paysan. En mettant notre outil de production à disposition de ces sociétés, nous les enrichissons et dépossédons les paysan·nes de leur autonomie. Nous appelons à refuser massivement ces projets ! »
7 mois après le début de ce papier dont la version courte parue dans L’Empaillé a été lue par les commerciaux de Sun’Agri qui cherchent maladroitement à s’en défendre, la mairie de Fourques se déclare contre le 3eme projet de Sun’Agri et cherche à le bloquer. Face à la boîte d’Antoine Nogier qui n’avait pas prévenu des propriétaires que les chantiers et les lignes électriques allaient passer dans leurs terrains, des chaînes ont été mises en place et bloquent les chantiers. La première réunion d’information contre la succursale d’ Eiffage se tiendra à Terrats le 28 février à 18h.
Dans les Aspres, tout le monde est en train de détester Sun’ Agri.
Loïc Santiago, le 21 février 2023.
Merci à Dorothée Lebrun pour son reportage photo !
2 https://www.lagri.fr/abris-photovoltaiques-du-houblon-pour-les-brasseries-locales-par-thierry-masdeu
6 https://reporterre.net/Dans-le-lot-un-projet-agrivoltaique-divise-Montcuq-en-Quercy-Blanc
7https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/communique-n.10-def-ademe-agrivoltaisme.pdf
8« Reprendre la terre aux machines. L’Atelier paysan. Manifeste pour une autonomie paysanne et alimentaire ». Seuil 2021
9https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/communique-n.10-def-ademe-agrivoltaisme.pdf
10https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/communique-n.10-def-ademe-agrivoltaisme.pdf
11https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/communique-n.10-def-ademe-agrivoltaisme.pdf
12 https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/pv_sur_terrains_agricoles_-_resume_executif-1.pdf
14https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/Conf_positionnement_agrivoltaisme_VF_BD_280922.pdf
15https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/Communique.Les-senateurs-agrivoltes-1.pdf
16https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/communique-n.10-def-ademe-agrivoltaisme.pdf
17https://lempaille.fr/contre-lagrivoltaisme-lautonomie-paysanne
18 « Paysans, notre métier n’est pas de produire de l’énergie », Reporterre, 02/12/22
20 Bilan Elec de la Creuse 2019, page 77 https://www.creuse.gouv.fr/content/download/14944/106447/file/11%20R%20CE%20PJ10_2_Registre_electronique%202.pdf
24 https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/2022_pv_synthese_lpo.pdf
26 https://www.alternatives-economiques.fr/lagrivoltaisme-une-menace-lagriculture/00103891
27 https://www.youtube.com/watch?v=EDJTIJ2B_aE
28https://www.sunti.fr/fr/agrivoltaisme-sunti-sassocie-a-sunagri/
32https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/communique-n.10-def-ademe-agrivoltaisme.pdf
33 https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/2022_pv_synthese_lpo.pdf
35https://www.greenunivers.com/2022/09/sunr-sapprete-a-rejoindre-eiffage-297777/
36https://www.reussir.fr/agrivoltaisme-eiffage-entre-au-capital-de-sunr
37 jusqu’à son changement de nom en 2018
39https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/communique-n.10-def-ademe-agrivoltaisme.pdf
42https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/Domaines-acquis-Solaspres1-scaled.jpg
45http://www.lalettrem.fr/la-lettre-m/andre-tomas
47https://www.coordinationrurale.fr/vignes-sous-panneaux-photovoltaiques-les-enjeux-sont-multiples/
48https://www.coordinationrurale.fr/agrivoltaisme/
49.https://www.coordinationrurale.fr/agrivoltaisme/
50 https://www.coordinationrurale.fr/agrivoltaisme/
52https://www.coordinationrurale.fr/retour-lassemblee-generale-de-cr66/
56 https://rierecadene.com/wp-content/uploads/2020/12/07-12-20-IND-CATALAN_IN-3-P03CT-2.pdf
57https://po.chambre-agriculture.fr/agroenvironnement/energies/agrivoltaisme/
59http://www.lambertcommunication.com/resources/2019_Serres_chauff%C3%A9es/Mediapart%20Article.pdf
60https://tecsol.blogs.com/mon_weblog/2021/12/francis-vila-lagriculteur.html
62https://www.societe.com/entreprises/_lieu%20dit%20sarrat%20d%20en%20padern/66300_CAMELAS.html
63 https://volterres.fr/volterres-signe-ses-premiers-partenariats-avec-des-producteurs-independants/
67 https://entreprise.maif.fr/actualites/2019/agricultute-bio-maif-transition
68http://uicn-fr-collectivites-biodiversite.fr/solutions-fondees-sur-la-nature/
C’est à l’issue de la COP21, puis en 2016, à l’occasion du Congrès mondial de la nature, que la place des Solutions fondées sur la Nature dans l’atteinte des objectifs de développement durable et notamment dans l’action climatique a été réellement reconnue au niveau international, à la fois dans l’Accord de Paris. En France, le nouveau Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC 2) et le nouveau Plan Biodiversité (2018) promeuvent l’utilisation des Solutions fondées sur la Nature. Le Comité français de l’UICN est impliqué dans le projet Life intégré ARTISAN, piloté par l’OFB, qui participe à la mise en oeuvre de ces plans.
69 https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/CNPN-Avis-PJL-Acceleration-ENR-1.pdf
71https://www.youtube.com/watch?v=iBe49XHWUFE
